Molécules de fusion et facteurs de transcription dans les macrophages et cellules musculaires squelettiques de rats : l'effet de la dénutrition néonatale
Auteur / Autrice : | Juliana Félix de Melo |
Direction : | Marie-Danielle Nagel, Muriel Vayssade, Cécilia Maria Machado Barbosa de Castro |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Bio-ingénierie, biomécanique, biomatériaux |
Date : | Soutenance en 2012 |
Etablissement(s) : | Compiègne en cotutelle avec Universidade Federal de Pernambuco, Brésil |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Cette thèse en co-tutelle a été effectuée à l’Université de Technologie de Compiègne (UTC - France) et à l’Université Fédérale de Pernambuco (UFPE - Brésil). En France, les activités ont été réalisées dans l’unité de Biomécanique-Bioingénierie (CNRS UMR 6600) de l’UTC, et au Brésil, dans le Laboratoire de Physiologie de la Nutrition Naíde Teodósio (LAFINNT) du Département de Nutrition de l’UFPE, dans le Laboratoire d’Immunopathologie Keizo Asami (LIKA-UFPE) et au sein du Centre de Recherche Aggeu Magalhães (Fiocruz PE). Une déficience nutritionnelle pendant la période critique du développement des systèmes organiques, comme par exemple les systèmes immunitaire et musculaire squelettique, peut générer des conséquences délétères au niveau structural et fonctionnel de ces systèmes chez l’adulte (OZANNE et HALES, 2002 ; LUCAS, 2005). Ainsi, il a été mis en évidence qu’une dénutrition protéino-calorique provoquait une réduction de l’immunité à médiation cellulaire, de la fonction phagocytaire, de celle du système du complément, de la production d'anticorps, de la libération de cytokines et de l'expression des molécules d'adhésion cellulaire (CHANDRA, 2002 ; LANDGRAF et al. , 2005). Dans cette situation, les mécanismes de défense pulmonaire sont touchés avec une diminution du nombre de macrophages alvéolaires (MA). De plus, plusieurs fonctions des macrophages sont affectées par la dénutrition néonatale (MELO et al. , 2008; FERREIRA E SILVA et al. , 2009). Pour combattre l’infection, les macrophages peuvent fusionner en réponse à des agents pathogènes et corps étrangers, donnant lieu à des ostéoclastes (os) ou des cellules géantes multinucléées (CGM) (dans divers tissus). Des études montrent que la Ecadhérine contribue à la formation des CGM par l’intermédiaire de la cytokine IL-4 (MORENO et al. , 2007; HELMING et GORDON, 2009). En plus de l’IL-4, l’interféron γ (IFN-γ) peut également induire la formation des CGM (HELMING et GORDON, 2008, 2009). D’autre part, une dénutrition précoce est capable de diminuer la capacité de différenciation des cellules musculaires et de réduire le nombre de fibres présentes dans le muscle (WILSON et al. , 1988; BAYOL et al. , 2004). Les rats dont les mères ont été dénutries par un régime à base de caséine 8% présentent une réduction du nombre de fibres musculaires et une diminution de la formation de myotubes secondaires (WILSON et al. , 1988). De plus, Bayol et al. (2004) ont montré que la dénutrition pendant la gestation réduisait la cellularité dans le muscle après 3 semaines de restauration nutritionnelle. Cependant, peu d’études ont été consacrées à l’effet d’une dénutrition infligée pendant la période de lactation, sur les propriétés des cellules musculaires de l’adulte. Certaines molécules d'adhésion cellulaire telles que les cadhérines et les intégrines sont importantes pour la première phase de fusion des cellules musculaires squelettiques (myoblaste x myoblaste), conduisant à la néoformation de myotubes. Horsley et al. (2003) ont démontré que ces myotubes primaires sécrétaient de l’IL-4, qui interagit avec son récepteur (IL-4Rα) présent sur les myoblastes pour promouvoir leur fusion avec les myotubes préexistants (myoblaste x myotube), augmentant ainsi la taille des myotubes. Les facteurs de transcription Pax7 et myogénine sont importants pour le développement musculaire. Pax7 est exprimé dans les cellules satellites quiescentes et en phase de prolifération (FOSCHINI et al. , 2004). La myogénine est exprimée dans tous les myoblastes depuis le début de leur différenciation et son expression est maintenue lors de la fusion des cellules, marquant aussi la fin de la prolifération des myoblastes (TE PAS et al. , 1999). Le but de notre étude a été de déterminer quelle influence pouvait, chez des rats jeunes et adultes, avoir l’application d’un régime hypoprotéiné au cours de la période de lactation, sur l’expression/production des molécules de fusion dans les macrophages alvéolaires et sur celle de protéines-clés impliquées dans le développement et la différenciation des cellules musculaires squelettiques. Nous avons utilisé 36 rats, mâles, Wistar, allaités par des mères ayant été nourries avec un régime contenant 17% de caséine dans le groupe contrôle (C) ou 8% de caséine dans le groupe dénutri (D), pendant la période de l’allaitement. Après le sevrage, les animaux ont été restaurés avec l’alimentation Labina ou de Teklad Global, jusqu’à 42 jours (n=12), 60 jours (n=12) et 90 jours (n=12). La moitié de ces animaux (n=18) a subi une trachéotomie dans le but de pratiquer un lavage bronchoalvéolaire pour ensuite cultiver des macrophages alvéolaires pendant 4 jours. L’autre moitié (n=18), a servi à prélever tous les muscles des deux pattes postérieures de l’animal et à maintenir en culture les cellules musculaires squelettiques pendant 10 jours. Le poids des rats a été enregistré tous les cinq jours pendant les 21 premiers jours après la naissance, puis une fois par semaine, afin de surveiller le gain de poids pendant la phase de récupération nutritionnelle. Le nombre total de cellules a été évalué indirectement par la libération de l’enzyme lactate déshydrogénase (LDH) après lyse cellulaire provoquée. Nous avons examiné l’expression de Pan-cadhérine (dans les macrophages) et de Pan-cadhérine, β1-intégrine, IL-4Rα, Pax7 et myogénine (dans les cellules musculaires) par Western Blot. Les productions d’IL-4 (dans les macrophages et les cellules musculaires) et IFN-γ (dans les macrophages) ont été mesurées par ELISA. Les résultats de cette thèse sont rapportés dans (02) articles originaux. Le premier (développé à l’UFPE) intitulé “Long-term effects of a neonatal low-protein diet in rats on the number of macrophages in culture and the expression/production of fusion proteins” indique que la dénutrition pendant la lactation affecte le nombre de macrophages dans les cultures cellulaires et la production de protéines de fusion chez les rats jeunes et adultes, mais ne modifie pas l’expression des cadhérines. Le deuxième (développé à l’UTC), intitulé “Effect of a neonatal low-protein diet on the morphology of myotubes in culture and the expression of key proteins that regulate myogenesis in young and adult rats” montre que la dénutrition néonatale ne modifie pas l’expression de protéines clés du processus myogénique mais change la morphologie et réduit le nombre de myotubes dans les cultures obtenues à partir des animaux âgés de 60 jours. Des analyses complémentaires portant sur les paramètres de contraction des myotubes mesurés chez les animaux dénutris et leurs témoins ont été réalisées dans le cadre du projet de thèse de Simone Fraga. En conclusion, la dénutrition néonatale provoque des séquelles chez les organismes jeunes et adultes, même après restauration nutritionnelle. Ces changements observés à partir de cultures cellulaires sont évidents dans le développement des macrophages alvéolaires et dans la myogenèse. Comme perspectives de ce travail, il peut être envisagé d’évaluer les répercussions de la dénutrition induite dans la période pré-natale sur la fusion des macrophages et des cellules musculaires squelettiques lorsque les animaux sont soumis à une activité physique, mais aussi chez des animaux rendus septiques (durant l’infection on peut noter une perte de muscle généralisée et l’activité physique pourrait moduler ce processus); de réaliser des co-cultures de macrophages alvéolaires et de myotubes nouvellement formés et vérifier l’effet de la dénutrition précoce sur l’index de fusion de ces cellules in vitro. En effet, selon Chargé (2003), la voie de signalisation qui active la fusion des cellules musculaires active aussi celle des macrophages, ce qui suggère la possibilité de fusion illégitime entre macrophages et myotubes.