La bataille décisive
Auteur / Autrice : | Laurent Danet |
Direction : | Jean-Paul Joubert |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences politiques |
Date : | Soutenance le 14/12/2011 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de droit (Lyon) |
Jury : | Président / Présidente : Jean Leca |
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Paul Joubert, Jean Leca, Jacques Viret, Alain Joxe | |
Rapporteur / Rapporteuse : Jacques Viret |
Résumé
La bataille décisive est une notion vague mais immédiatement intelligible par tout un chacun. Elle fonctionne à la manière d’un comprimé idéologique. Son utilisation discursive renvoie à l’imagerie populaire des exploits de grands capitaines, ou à des points chauds de rencontre entre armées titanesques, aux visages innombrables tendus par la conscience de jouer la survie de son roi ou de sa nation. La bataille décisive reste également chez les auteurs spécialisés une notion communément admise mêlant concentration géographique et accélération historique, la raison d’être de la guerre. Mais si l’on considère que les belligérants, en l’occurrence les collectivités politiques, procèdent d’uns substance psychique et non plus d’une simple structure sociale, la notion de bataille décisive prend une autre profondeur. L’être psychique collectif acquiert en effet un patrimoine archétypal absent de la politie vue comme un acteur purement rationnel. L’empirisme historique et un certain nombre d’auteurs philosophes, psychologues et anthropologues, montrent que ces archétypes seraient les pôles animus et anima siégeant dans l’inconscient collectif. Les formes politiques des collectivités exprimeraient directement ces archétypes, habituellement dilués en chacun de nous par l’écran de l’inconscient individuel. A chaque forme politique, clan, tribu, nation, correspondrait une relation spécifique entre les deux pôles. Les avatars historiques du Père Totémique freudien sont le chef, le roi, Dieu-le-Père, etc. Contre lui, les avatars de la Déesse-Mère matricielle se décantent en territoire, sanctuaire, Mère-Patrie, etc. C’est lorsqu’il y a correspondance géographique entre deux avatars, en l’occurrence lorsque le pouvoir homogène du chef correspond d’une manière nette au territoire collectif matriciel, les murs de la Cité ou les frontières de l’Etat, par exemple, que le bataille décisive apparaît à la pointe de la théorie et de la pratique. Cette perspective pourrait projeter une lumière nouvelle sur les relations internationales. Le recours à la bataille décisive marque l’intention fébrile d’annihiler définitivement l’ennemi afin de maintenir la pureté de sa matrice maternelle, originelle et performatrice. Cette angoisse de la souillure du viol, certes spatial mais également culturel, dénote le caractère sexuel collectif de la guerre, en ce sens que la guerre serait la pratique sexuelle des collectivités politiques. Cette pratique anthropologique s’avère plus profonde que la guerre elle-même. Le paroxysme de la crise internationale remplace actuellement la bataille décisive de la guerre, et corrobore en effet l’idée de pilotes archétypaux clandestins, sans que ces derniers ne soient cependant déterministes et fatals.