Thèse soutenue

Le français colonial : politiques et pratiques de la langue nationale dans l’Empire (1880-1962)

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Auteur / Autrice : Alice Goheneix-Minisini
Direction : Astrid von Busekist
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Science politique
Date : Soutenance en 2011
Etablissement(s) : Paris, Institut d'études politiques

Résumé

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A partir de l’argumentaire développé par les pères de l’idée coloniale française, par les fondateurs de l’Alliance française et par Onésime Reclus (inventeur du mot francophonie en 1880), mais également en nous appuyant sur les textes législatifs et les programmes scolaires encadrant les pratiques linguistiques dans les colonies, nous mettons en évidence le rôle équivoque dévolu à la langue dans le processus de colonisation. Il s’agit en effet tout à la fois de créer de la ressemblance (afin de manifester la puissance de l’empire français et de favoriser le commerce avec les colonisés) mais également de maintenir une distance entre la maîtrise de la langue des colonisateurs et celle des populations indigènes. En conséquence, la francisation doit être suffisamment sélective, d’une part pour éviter la formation de masses indigènes « déclassées » et rétives à la colonisation, d’autre part de continuer à pouvoir justifier leur non inclusion dans la communauté des citoyens français. Cette double tension se manifeste dans la scolarisation parcimonieuse des enfants indigènes en français pendant la période 1880-1945, mais également, a contrario, dans les progrès simultanés de la scolarisation en français et des droits à la citoyenneté obtenus par les colonisés après 1945. Ainsi le projet francophone, qui naît au moment des indépendances à l’initiative d’une minorité de colonisés extrêmement éduqués reste équivoque. Il peut être interprété par le nationalisme français comme le succès de la mission civilisatrice. Mais il peut également être compris comme un héritage du mouvement de la Négritude et l’arrachement de la langue française à la nation française.