Thèse soutenue

Déséquilibre excitation/inhibition dans la moelle épinière dorsale en situation de douleurs chroniques : rôle des molécules d’adhérence neuroligines

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Auteur / Autrice : Tiphaine Dolique
Direction : Frédéric Nagy
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences, technologie, santé. Neurosciences
Date : Soutenance le 08/07/2011
Etablissement(s) : Bordeaux 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Talence, Gironde ; 1993-....)
Jury : Président / Présidente : Roger Marthan
Examinateurs / Examinatrices : Yves De Koninck, Olivier Thoumine
Rapporteurs / Rapporteuses : Frédérique Varoqueaux, Eric Lingueglia

Mots clés

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Résumé

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En état de douleur chronique, la sensibilisation centrale s’accompagne d’une modification de l’équilibre excitation/inhibition en faveur d’une excitation accrue de la corne dorsale de la moelle épinière. Cet équilibre implique des molécules d’adhérence telles que les neuroligines postsynaptiques (NLs). Dans une première partie de notre travail de thèse, nous avons étudié la régulation éventuelle de ces protéines dans un modèle de douleur neuropathique (Spinal Nerve Ligation, SNL) chez le rat. Nos données ont montré une surexpression inattendue de la NL2, généralement associée à l’inhibition, alors que l’expression de la NL1, généralement associée à l’excitation, ne change pas. Le blocage de l’expression de NL2 in vivo par application intrathécale de siRNA, a produit des effets anti-nociceptifs réversant de façon significative l’allodynie mécanique observée chez les rats SNL. L’étude ultérieure des partenaires pré- et postsynaptiques de NL2, a démontré une co-variation spécifique avec PSD95, une protéine d’échafaudage des synapses excitatrices. De plus, une approche par co-immunoprécipitation a mis en évidence une augmentation significative des interactions protéiques NL2 /PSD95 chez les rats SNL. Enfin, cette association inhabituelle en condition neuropathique, est apparue liée à la surexpression spécifique de NL2(-), un variant d’épissage de NL2 normalement minoritaire en condition physiologique. La surexpression, l’augmentation d’association avec PSD95, et l’effet pro-nociceptif inattendu de la NL2 « inhibitrice » en condition de douleur neuropathique, indiquent une permutation fonctionnelle de la NL2 de l’inhibition vers l’excitation modifiant le rapport synaptique en faveur d’une excitation globale plus élevée dans la corne dorsale.Dans une deuxième partie du travail, nous avons exploré le rôle des molécules d’adhérence NLs dans la sensibilisation spinale associée à un autre type de douleur chronique, à savoir la douleur cancéreuse, sur un modèle de cancer de l’os chez le rat. L’étude de l’expression des NLs et de leurs partenaires, a montré une augmentation d’expression spécifique de la NL1 et de S-SCAM, une autre protéine d’échafaudage des synapses excitatrices. D’autre part, d’après la littérature, ce modèle se caractérise par une importante activation gliale dans les cornes dorsales de la moelle épinière, se traduisant notamment par une astrogliose massive. Cependant, nous avons montré que dans le modèle utilisé, il n’y avait aucune variation ni de marqueurs classiques de l’activation astrocytaire (GFAP, S100β), ni des marqueurs microgliaux (OX-42 et Iba1). Au contraire, tous ces paramètres étaient effectivement augmentés dans la corne dorsale ipsilatérale d’animaux neuropathiques. Ces résultats suggèrent que, contrairement à ce qui a été décrit précédemment, la douleur cancéreuse d’origine osseuse n’est pas nécessairement corrélée à une surexpression spinale des marqueurs de la glie réactive, tandis que la douleur neuropathique l’est.En conclusion, nos résultats obtenus dans le modèle de douleur cancéreuse montrent un phénotype concernant des molécules impliquées dans la formation, la spécification et la modulation des synapses, bien différent de celui que nous avons mis en évidence dans le modèle de douleur neuropathique. Nous montrons notamment dans les deux modèles, une implication bien distincte des molécules d’adhérence NLs et de la glie confortant les données de la littérature indiquant que ces deux grandes catégories de douleur chronique ont chacune une signature propre. De plus, nos résultats ouvrent la perspective d’identifier de nouveaux diagnostics et/ou de nouvelles possibilités thérapeutiques, en ciblant spécifiquement les NLs.