Mécanismes mis en jeu dans la libération d'endozépines induite par le peptide bêta amyloïde : rôle du gliopeptide ODN dans l'activité astrocytaire
Auteur / Autrice : | Raya Hachem |
Direction : | Mohamed Amri, Marie-Christine Tonon |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie cellulaire. Neurosciences |
Date : | Soutenance en 2010 |
Etablissement(s) : | Rouen en cotutelle avec Université de Tunis El Manar |
Mots clés
Résumé
Le terme endozépine (EZ) désigne une famille de peptides, considérés comme les ligands naturels des récepteurs des benzodiazépines, qui inclut le diazepam-binding inhibitor (DBI) et ses dérivés dont l'octadécaneuropeptide (ODN). Dans le système nerveux central (SNC) des mammifères, les EZ sont essentiellement localisées dans les cellules astrogliales. Bien que le DBI soit dépourvu de séquence signal, les EZ sont libérées dans les surnageants de culture. Les EZ sont également présentes dans liquide céphalo-rachidien et leur concentration est augmentée notamment chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer (MA). Cette maladie se caractérise par des dépôts de peptide bêta-amyloïde (βA), ou plaques séniles, une astrogliose importante, ainsi qu'une production de cytokines pro-inflammatoires, dont l'interleukine 1β (IL-1β), et de dérivés réactifs de l'oxygène (ROS). Des travaux menés sur des astrocytes en culture démontrent que le βA25-35 stimule la synthèse et la libération d'EZ. Néanmoins, les mécanismes mis en jeu dans la libération d'EZ induite par le βA, ainsi que le rôle de cette production d'EZ dans l'activité astrocytaire sont inconnus. Nous nous sommes donc intéressés aux systèmes de transduction activés par le βA, aux récepteurs mis en jeu, ainsi qu'aux processus impliqués dans la libération d'EZ induite par le βA. Ensuite, nous avons recherché les conséquences de cette libération d'EZ sur l'activité astrocytaire. La première étape de ce travail a consisté à rechercher les voies de transduction et les récepteurs activés suite à l'administration de βA, sur des astrocytes de rat en culture. Nous avons ainsi montré que le βA induit une augmentation rapide et transitoire (10 min) de la production d'AMPc et stimule de façon temps- et dose-dépendante l'incorporation de l'[3H]inositol dans les polyphosphinositides (PIPs). L’action du βA sur le métabolisme des PIPs est totalement abolie par un inhibiteur de PLC, l'U73122, et elle est mimée par le fMLF, un agoniste des récepteurs des peptides N formylés (FPRs). Les actions du βA et du fMLF sont bloquées par le N-t-Boc-FLFLF, un antagoniste de ces mêmes récepteurs, suggérant que le peptide βA peut moduler certaines activités astrocytaires en interagissant avec des FPRs fonctionnels. De fait, nous montrons que la libération d'EZ induite par le βA est reproduite par deux agonistes de ces récepteurs, et qu'elle est totalement abolie par le N-t-Boc-FLFLF. De plus, la faible affinité (µM) des FPRs astrocytaires pour les deux agonistes fMLF et fMMM, suggère la mise en jeu de récepteurs FPR-like 1 (FPRL1). L'activation des protéines kinase A (PKA) et C (PKC), qui fait suite à l'interaction du βA avec les FPRL1, ainsi qu'un influx calcique sont indispensables à la libération d'EZ induite par le βA. Enfin, nous avons montré que l'exportation des EZ vers le milieu extracellulaire induite par le βA, s'effectue via des transporteurs du type ATP-binding cassette (ABC) sensibles au glyburide. Dans la deuxième partie de ce travail, nous avons recherché l'implication des EZ libérées dans les effets du βA sur l'activité astrocytaire. L'action du βA25-35 sur la prolifération astrocytaire, qui est reproduite par le fMLF, est totalement bloquée par le N-t-Boc-FLFLF indiquant la mise en jeu de FPRs. L'ODN stimule également la prolifération astrocytaire à 48 h en agissant probablement via un site de très haute affinité (10-12 M) et un site de haute affinité (10-8 M). Un effet stimulateur de l'ODN est retrouvé pour des temps plus courts (12 h) suggérant que les EZ peuvent également favoriser la survie des astrocytes. La libération d'IL-1β induite par le βA, suit celle des EZ de quelques heures. Néanmoins, nos résultats préliminaires suggèrent que les EZ ne peuvent pas reproduire l'effet du βA sur la libération d'IL-1β car l'ODN (10-8 M) augmente les ARNm codant l'IL-1β que transitoirement, et exerce un effet majoritairement inhibiteur sur l’expression d'IL-1β dans les astrocytes. Enfin, l'IL-1β (2,5 ng) est sans effet sur l'expression du DBI. Ces données suggèrent donc que le βA stimule la libération d'IL-1β indépendemment de celle des EZ. En accord avec un rôle de l'ODN sur la survie des astrocytes, nous montrons, qu'à la concentration de 10-9 M, le peptide réduit considérablement la production de ROS induite par le H2O2 (de 400 à 800 µM) en stimulant l'activité de la superoxyde dismutase (SOD) et de la catalase. L'ODN est également capable de contrecarrer l'action du H2O2 sur le potentiel mitochondrial et l'activité de la caspase 3. Ainsi, la présence de l'EZ ODN dans le milieu extracellulaire permet de réduire la mort par apoptose induite par le production de ROS. Néanmoins, les EZ ne peuvent protéger les astrocytes d'un stress oxydatif majeur. L'ensemble de nos résultats indique donc que le βA stimule la libération d'EZ via l'activation des FPRs positivement couplés aux voies AC/PKA et PLC/PKC. La translocation des EZ vers milieu extracellulaire est PKA-, PKC- et Ca2+-dépendante, et met en jeu des transporteurs ABC. Les EZ libérées peuvent à leur tour mimer l'effet du βA sur la prolifération astrocytaire et contrecarrer certains effets délétères du peptide amyloïde en favorisant notamment la survie cellulaire.