L'indemnisation du chômage aux XIXe et XXe siècles : à travers l'exemple lyonnais
Auteur / Autrice : | Claire Bonici |
Direction : | Nicole Dockès-Lallement |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire du droit, des institutions et des faits sociaux |
Date : | Soutenance en 2010 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Mots clés
Résumé
A la fin du XIXe siècle, avec le développement de la pauvreté ouvrière, les gouvernements mirent en place divers systèmes de protection sociale pour tenter d’éviter des troubles sociaux ainsi qu’une remise en cause de l’ordre capitaliste établi. Influencés par les principes révolutionnaires de liberté du travail et d’autonomie de l’individu, ils n’admirent qu’avec grande difficulté l’idée d’une prise en charge du risque chômage. Son intégration dans un projet politique global d’intervention sociale remettait en cause, (plus encore que les autres risques), les dogmes libéraux proclamés par les Constituants et elle n’intervint qu’au terme de longues controverses. Elle impliqua notamment que les interventions auprès des sans-emploi fussent délivrées de leur fondement philosophique moralisateur et assistanciel et elle posa la question de l’identification des chômeurs au sein de la communauté des pauvres comme celle de leur reconnaissance en tant que catégorie spécifique méritant un traitement particulier. Au cours du XIXe siècle, malgré leur hostilité de principe à la délivrance de secours à des hommes valides sans travail, les régimes successifs tolérèrent l’intervention ponctuelle officieuse de certains groupements ouvriers, en raison de leur utilité sociale. Le chômage devint alors, durant de nombreuses années, un risque abandonné à la solidarité ouvrière. L’exemple lyonnais, dans ses diversités et ses richesses, illustre cette évolution inscrite entre précarité, suspicion, répression puis reconnaissance. Les expériences associatives, mutualistes ou syndicales de sociétés ouvrières y furent nombreuses. Soumise à des périodes de chômage récurrentes, la cité lyonnaise connut, dès le début du XIXe siècle, diverses tentatives de mise en place d’un droit au secours en cas de chômage. Audacieuses, certaines d’entre elles eurent un écho national. Motivées par des aspirations très divergentes, la société de secours mutuels des chapeliers et celle des typographes se distinguèrent par l’ampleur et l’intérêt de leurs réalisations. Avec elles, le droit au secours de chômage devint un artisan actif de l’identité ouvrière lyonnaise. Dans les dernières années du XIXe siècle, la volonté de stabiliser la République et l’arrivée au pouvoir d’hommes nouveaux permirent de prendre conscience de la nécessité d’établir une protection contre les risques collectifs liés à l’industrialisation. Inscrite dans une logique de renouvellement des modes d’intervention fondés sur la charité, la mise en place du dispositif d’assurance sociale contre le chômage suscita de nombreuses polémiques, tant devant le Conseil supérieur du travail qu’au Parlement. De ces dernières découla le décret du 9 septembre 1905 créant des subventions publiques en faveur des caisses de chômage. Importante, cette première charte de l’assurance chômage fut parfois précédée de réalisations locales, notamment municipales. Ce fut le cas de Lyon dont le maire obtint, en 1904, le droit de subventionner les caisses syndicales, afin qu’elles assurent la délivrance de secours aux chômeurs de la ville Il a paru intéressant d’étudier en parallèle les débats et réticences qui se déroulaient au plan national et le pragmatisme, souvent philanthropique, de la plus grande cité ouvrière de province dont les expériences précédèrent souvent la loi.