Thèse soutenue

Etudes des acouphènes chez l'homme et dans des modèles animaux : corrélats électrophysiologiques chez l'animal éveillé : rôle des prothèses auditives dans le traitement des acouphènes chez l'homme

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Auteur / Autrice : Graeme Moffat
Direction : Christine AssaianteCatherine Liégeois-Chauvel
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de la vie et de la santé. Neuroscience
Date : Soutenance en 2010
Etablissement(s) : Aix-Marseille 1
Partenaire(s) de recherche : Autre partenaire : Université de Provence. Section sciences

Mots clés

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Résumé

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Les acouphènes sont des hallucinations auditives (ou perception fantôme) perçus dans une ou deux oreilles. Les personnes souffrant d'acouphènes décrivent le plus souvent ces derniers comme la perception de sifflements ou de bourdonnement alors qu'il n'y a pas de stimulation extérieure et représentent 8 à 10 % de la population dans les pays industrialisés. La présence d'acouphènes peut entraîner des modifications notables du comportement et une détérioration de la qualité de vie (irritabilité, tension, inquiétude, détérioration des fonctions intellectuelles). A l'heure actuelle, aucun traitement efficace pour les traiter n'a été encore trouvé. Le développement de tels traitements est impératif et nécessite la compréhension d'une part des mécanismes physiologiques sous jacents et d'autre part de l'efficacité et des limites des différentes stratégies de traitement disponibles. Etant donné que la relation entre acouphènes et perte auditive est bien établie et qu'il y a un consensus sur les modèles physiologiques des acouphènes, entre autres le rôle important de la déafférentation sensorielle due à une lésion périphérique, les stratégies thérapeutiques visant à restaurer l'entrée sensorielle du système auditif central par l'intermédiaire d'une stimulation acoustique supraliminaire devrait être efficace pour modifier ou alléger ce symptôme. En collaboration avec deux laboratoires (Lyon et Marseille), j'ai testé l'efficacité de deux protocoles de traitement acoustique destinés à diminuer les acouphènes. Dans la première expérience, les patients souffrant d'acouphènes ont bénéficié de l'un ou l'autre régime d'aide auditive amplifiée, soit une amplification clinique standard qui est connue pour calmer les acouphènes dans certains cas, soit une amplification large bande incluant les hautes fréquences pour laquelle le modèle neurophysiologique des acouphènes prédit qu'elle devrait être plus efficace que l'amplification standard. Les résultats ont montré que seule l'amplification standard avait un effet sur la sensation perçue des acouphènes. Le fait que l'amplification élargie aux hautes fréquences n'ait aucune répercussion pour la perception suggère l'existence d'une limite physiologique ou technique non identifiée empêchant l'efficacité de cette stratégie thérapeutique. Cependant, l'influence des régions cochléaires mortes et des périodes sensibles et/ou la perte de la plasticité neuronale auditive doivent être considérées. Dans une seconde série d'expériences, nous avons cherché les corrélats neuronaux des acouphènes chez l'animal éveillé ce qui n'avait jamais été fait auparavant en utilisant des méthodes différentes d'induction des acouphènes. Nous avons induit la perception d'un son fantôme (Zwicker tone) chez les animaux soit par injection de salycilate (aspirine) à haute dose, soit par traumatisme sonore aigü, ces deux méthodes étant bien connues pour entraîner des acouphènes. Nous n'avons trouvé aucun corrélat neuronal du phénomène Zwicker tone mais nous avons observé une augmentation de l'amplitude des potentiels évoqués enregistrés au niveau du cortex auditif et une diminution d'amplitude de la puissance spectrale de l'EEG dans les bandes de fréquences allant de 10 à 30 Hz après injection de salicylate ou traumatisme sonore. De plus, nous avons trouvé une diminution généralisée de l'entropie de l'EEG après administration de salicylate. Ces résultats suggèrent que le modèle salycilate n'entraîne pas des effets analogues à ceux liés au traumatisme sonore, notamment par les changements d'entropie observés au niveau cortical, changements indépendants des effets auditifs. Ces deux expériences mettent en évidence des failles importantes dans le modèle neurophysiologique expérimental des acouphènes. Leur sensation permanente est probablement due, dans la plupart des cas, à des lésions cochléaires ou nerveuses proches de la cochlée et que les cas de lésions cochléaires pourraient présenter une limite insurmontable à l'efficacité des thérapies acoustiques. De futures implications et considérations sur d'autres stratégies thérapeutiques sont discutées.