Les déterminants de la course à pied en Afrique soudano-sahélienne : de l'utilitarisme à l'olympisme
Auteur / Autrice : | Yaya Koné |
Direction : | Pierre-Philippe Rey |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Anthropologie |
Date : | Soutenance en 2009 |
Etablissement(s) : | Paris 8 |
Mots clés
Résumé
Cette étude anthropologique met en évidence les facteurs sociaux de la course à pied, de la course pensée à la technologie de la pratique. La course est une activité corporelle, qui varie selon le contexte culturel et les représentations des sociétés. Comment passe-t-on de la sédentarité à la course à pied régulière, et de la course informelle à l’athlétisme ? Là où nous cherchions à savoir, comment des sociétés africaines se représentaient la pratique, nos différents interlocuteurs nous renvoyaient à la question : pourquoi courir ? De prime abord lorsque que l'on évoque la course en Afrique, c’est l'athlétisme qui nous vient à l’esprit. L'enquête de terrain en Afrique de l'ouest, nous renvoie à une autre idée de la course, celle vécue, celle subie, celle redoutée, une course en phase avec les réalités des jeunes africains. L'enquête se déroule sur le terrain, en pays Mandingue et Gur, principalement dans la région de Bamako (Koulikoro) et au sein du complexe ethnique Senoufo-Minianka, une zone transfrontalière aux confins du Mali, du Burkina Faso et de la Côte d'Ivoire. La course à pied est dépendante des éléments culturels et structurels, l'enquête nous montre également d’autres paramètres qui rentre en ligne de compte, comme le genre et la position sociale. Ce sont les individus qui connaissent les plus grandes difficultés socio-économiques qui sont les moins à même de pratiquer, à ce titre les femmes souffrent doublement. En tant que pauvres (tout comme 72% de la population), elles ne peuvent se permettre de courir, et leur appartenance à la gente féminine accroît le contrôle de la société sur toutes leurs activités. De plus, on ne peut évoquer la course et les loisirs sans faire le lien avec les secteurs d'activités, le travail et le temps libéré du travail, un temps qui doit être socialement utile, au plus grand nombre (pas d'égoïsme sportif, ni de pratique pour soi). Si l'implication dans les courses informelles est fortement dépendante de l'amélioration des conditions de vie des jeunes soudanais, l'entrée massive dans le milieu de l'athlétisme résulte de la possibilité de se réaliser, de réussir l'ascension sociale grâce à la pratique sportive. Plus l'exemple de réussite sociale par la course est proche, c'est-à-dire le fait d'un individu dont on se sent proche culturellement, géographiquement et socialement et plus l'identification engendre l'émulation au sein de la jeunesse. Contrairement à ce que l'on observe en Ethiopie, au Kenya, au Maroc ou plus récemment en Jamaïque, le modèle social de l'athlète héros n'apparaît ni au Mali, ni au Burkina Faso.