Thèse soutenue

Le récepteur 4 aux mélanocortines : un paradigme de la génétique de l'obésité

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Auteur / Autrice : Fanny Stutzmann
Direction : Philippe Froguel
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Génétique humaine
Date : Soutenance en 2009
Etablissement(s) : Lille 2

Résumé

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Les premières mutations causatives d'obésité dans le gène du récepteur 4 aux mélanocortines ont été identifiées en 1998. Depuis lors, MC4R a suscité un intérêt constant dans l'étude de l'obésité monogénique. C'est aujourd'hui la forme la plus commune d'obésité monogénique. En 2004, un variant rare non synonyme a été associé avec une diminution du risque d'obésité. L'étude approfondie de 25 familles tri-générationnelles porteuses de mutations pathogéniques de MC4R nous a permis de constater que la pénétrance des mutations est dépendante des générations (40% chez les grands-parents, 60% chez les parents et 78% chez les enfants, p=0,032). De plus, 50% des adultes non obèses à 20 ans sont devenus obèses de classe III (IMC≥40 kg/m²) à 45 ans. Les pressions de l'environnement obésogénique moderne peuvent expliquer ces deux phénomènes. En contrepartie, les mutations de MC4R ont le même effet quel que soit l'environnement socio-éducatif. Au cours de ce séquençage extensif, nous avons constaté que MC4R possède 3 variants rares. Le génotypage de ces variants chez 16800 individus européens de 10 cohortes différentes nous a permis de montrer l'association négative d'un second variant rare de MC4R avec l'obésité. En effet, le variant I251L diminue le risque d'obésité dans une large étude cas-contrôle française (OR=0,42 ; 95CI 0,25-0,73 ; p=0,001) et dans 3 études de cas-contrôle de réplication. Ce variant est sous-transmis aux enfants dans des familles avec obésité (23,3%, p=0,003). Il est associé avec une diminution de 0,76 DS du z-score d'IMC dans ces familles et de 0,35 DS dans des familles de population générale. Dans la population générale adulte, il est associé avec une diminution de 0,7 kg/m². Deux méta-analyses ont confirmé l'association négative du précédent variant V103I et du nouveau variant I251L avec l'obésité. La nouvelle technologie des puces à ADN et les études d'association génome-entier ont identifié deux locus dont les polymorphismes sont associés avec le risque d'obésité. Le premier locus est situé dans le premier intron du gène FTO dont la fonction et le rôle sont encore méconnus. Le second locus est situé à 188 kb en aval de la séquence codante de MC4R. Nous avons testé l'effet du rs1421085 de FTO et du rs17782313 de MC4R sur les troubles du comportement alimentaire dans trois cohortes d'obèses et deux cohortes de population générale. Le rs1421085 n'est associé avec aucun trouble dans aucune cohorte. Par contre, le rs17782313 est associé avec le grignotage chez les enfants obèses français (p=0,01), les adultes obèses suisses (p=0,04) et les adolescents finlandais (p=0,04). Il est également associé avec une augmentation du score de faim de Stunkard chez les adultes obèses français (p=0,02) et avec une tendance des enfants obèses français à ingérer de grandes quantités d'aliments pendant les repas (p=0,04). Dans les populations générales d'adolescents finlandais et d'adultes français, les deux polymorphismes ont un effet additif sur l'obésité, l'IMC et la masse grasse : les porteurs de 3 ou 4 allèles à risque ont une susceptibilité 3 fois supérieure à celle des individus ne portant aucun allèle à risque de devenir obèses durant l'enfance. Un faible niveau d'activité physique accentue les effets du rs1421085 (p=0,01) tandis que le rs17782313 montre une interaction avec le sexe : l'association est plus significative chez les hommes que chez les femmes. En résumé, les résultats obtenus au cours des études de MC4R et FTO montrent surtout l'impact de l'environnement aussi bien sur des polymorphismes que sur des mutations monogéniques, ce qui place la prise alimentaire et l'activité physique au coeur des préoccupations des médecins en charge de patients obèses