Thèse soutenue

Facteurs neurobiologiques associés à l'addiction à la cocaïne : etude au moyen d'un modèle d'addiction chez le rat

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Auteur / Autrice : Nadège Berson
Direction : Véronique Deroche-Gamonet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences, technologie, santé. Neurosciences
Date : Soutenance le 21/12/2009
Etablissement(s) : Bordeaux 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Talence, Gironde ; 1993-....)
Jury : Président / Présidente : Bruno Aouizerate
Rapporteurs / Rapporteuses : Rafael Maldonado, François Tronche

Mots clés

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Résumé

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De nombreux individus consomment une, ou plusieurs, substances psychoactives au cours de leur vie. Alors que la majorité des consommateurs maintient une utilisation épisodique et contrôlée, certains perdent le contrôle sur l’usage de la substance ; symptôme majeur d’une addiction. Comprendre les mécanismes psychobiologiques, qui sous-tendent cette vulnérabilité à passer d’un usage contrôlé à un usage compulsif, constituerait une étape décisive dans la compréhension de la pathologie et l’identification de cibles thérapeutiques pertinentes. En effet, malgré un intense effort de recherche au cours des 40 dernières années, les thérapies disponibles se révèlent d’une efficacité limitée. Il faut probablement en chercher la cause dans la complexité de la pathologie, mais aussi dans l’inadéquation des préparations expérimentales à la définition clinique de l'addiction. Dans ce contexte, une étape décisive a été franchie il y a 5 ans lorsque des chercheurs de notre équipe ont développé le premier modèle pluri-symptomatique d’addiction à la cocaïne chez le rat. Grâce à ce modèle, il est possible d’identifier des animaux qui développent un comportement similaire à l’addiction, alors que d’autres maintiennent un usage contrôlé, et ce, malgré une consommation préalable de drogue équivalente. S'appuyant sur ce modèle d'addiction chez le rat, le but de nos travaux de thèse était d’identifier des différences neurobiologiques entre usagers addicts et non-addicts et d’aborder les mécanismes neurobiologiques qui sous-tendent la transition vers l’addiction. Pour ce second point, nous avons considéré les différences majeures identifiées et étudié leur évolution de l’usage précoce de cocaïne (avant l'addiction) à l'usage tardif (après développement de l’addiction) en fonction des sujets (addicts versus non-addicts). Nous avons utilisé une approche multidisciplinaire associant les principales méthodes des neurosciences comportementales, moléculaires et des systèmes. Nous avons comparé addicts et non-addicts au moyen d’une stratégie ciblée et d’une stratégie non ciblée. La stratégie non ciblée a consisté à évaluer l'expression des gènes à grande échelle, dans des structures cérébrales clés, au moyen d’une technique de gene profiling (environ 28 000 gènes testés simultanément). L'approche ciblée a consisté à analyser des facteurs connus pour être modifiés par l'usage ou l’administration chronique de cocaïne. Nous nous sommes concentrés sur une structure majeure, le noyau accumbens, et avons étudié : i. l'expression de gènes cibles au moyen de la qPCR, ii. plusieurs formes de plasticité synaptique à l'aide de l’électrophysiologie in vitro, iii. l'activité des neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale (VTA) (projetant vers le noyau accumbens) au moyen de l’électrophysiologie in vivo, iv. la libération de dopamine dans le noyau accumbens au moyen de la microdialyse in vivo. Nous avons montré que les rats addicts et non-addicts s'adaptent très différemment à la cocaïne. Les usagers non-addicts paraissent en mesure de contrecarrer les changements neurobiologiques précoces provoqués par la cocaïne, tandis que les addicts ne le sont pas. Ils présentent des réponses neurobiologiques similaires à celles d'animaux naïfs vis-à-vis de la cocaïne ou d'animaux ayant été exposés à la drogue sur une très courte période. En résumé, les données obtenues au cours de ce travail de thèse modifient drastiquement la perception commune de la psychopathologie de l’addiction. L'addiction résulterait moins de modifications produites par la drogue (comme on le pense depuis 40 ans) que de l'incapacité à lutter contre ces modifications.