Du projet de paix perpétuelle de Kant à l'organisation des Nations Unies : l'état-nation comme sujet de droit
Auteur / Autrice : | Jean Claudy Pierre |
Direction : | Raphaël Draï |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Droit |
Date : | Soutenance en 2009 |
Etablissement(s) : | Aix-Marseille 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École Doctorale Sciences Juridiques et Politiques (Aix-en-Provence) |
Jury : | Président / Présidente : Yann Kerbrat |
Examinateurs / Examinatrices : Yann Kerbrat, Olivier de Frouville, Michel Terestchenko | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Olivier de Frouville, Michel Terestchenko |
Mots clés
Résumé
Dans la présente étude, nous procédons à une analyse critique de la théorie du droit mondial qui préconise le déclin de l’État comme présupposé et sujet du droit international. L’idée de ce déclin a été présentée et soutenue comme une condition indispensable à l’avènement d’un ordre juridique « global » dont l’individu deviendrait le principal sujet. Le droit mondial serait ainsi le seul cadre approprié à l’établissement de la paix. Invoquant l’idée kantienne de cosmopolitisme, les théoriciens du droit mondial croient trouver chez Kant un fondement philosophique à leur thèse. Cependant, une interprétation moins abusive du Projet de paix perpétuelle permet de voir que la souveraineté étatique n’est pas incompatible avec l’idée de paix. Pour Kant, s’il est nécessaire que les États aient recours à l’institutionnalisation juridique de leurs rapports extérieurs, ils ne peuvent pas toutefois se nier dans une « république universelle ». Car, étant donné que les peuples sont différents de par leur culture et vu que chaque peuple est appelé à exercer son droit à l’autodétermination, l’existence d’une pluralité d’États s’est imposée comme une réalité incontournable voire une nécessité. Il en résulte une société internationale composée d’États souverains et dotée d’un droit spécifique à sa condition. Depuis son apparition, l’ordre juridique international moderne suit un processus d’évolution qui est notamment marqué par deux caractéristiques antinomiques : le droit du libre recours à la guerre et le principe du non-recours à l’usage de la force ; celui-ci ayant été substitué à celui-là. Ce changement significatif a été rendu possible grâce à l’institutionnalisation des relations internationales due à l’initiative des États. Nombre d’auteurs avaient préconisé la création d’une organisation internationale comme moyen de pacification des rapports de coexistence interétatique. Cependant, n’ayant pas pris en compte certains aspects fondamentaux de la question, ils se sont contentés de proposer des « projets » que les États se devraient de mettre en application pour leur propre salut. Étant en rupture avec cette tradition de pensée, Kant est le premier penseur à avoir mis en lumière, non seulement la nécessité, mais aussi la possibilité d’une paix internationale qui soit l’expression de la volonté souveraine des États tout en étant fondée sur le droit. L’idée kantienne de paix perpétuelle est donc fondée sur la politique, le droit et la morale qui sont les trois catégories fondamentales de la pensée politicojuridique du philosophe. Il s’ensuit que l’institutionnalisation des relations internationales n’est pas une panacée qui pacifierait soudainement et une fois pour toutes les rapports de coexistence interétatique. Elle est de préférence une condition indispensable à la réalisation du droit international, c’est-à-dire un droit dont le principal objectif est la poursuite de la paix ; étant entendu que l’idée de droit est incompatible avec la guerre. C’est en raison de cela que le Projet de paix perpétuelle de Kant constitue un prisme adéquat pour une approche de l’ordre juridique international contemporain qui a été instauré avec la Charte des Nations Unies