Thèse soutenue

Effet de l’inactivité physique sur les balances énergétique et oxydative : Inférences sur le rôle de la sédentarité dans l’étiologie de l’obésité

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Auteur / Autrice : Audrey Bergouignan
Direction : Chantal Simon
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physiologie et biologie des organismes
Date : Soutenance en 2008
Etablissement(s) : Université Louis Pasteur (Strasbourg) (1971-2008)

Résumé

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L’obésité est une maladie du stockage des lipides et une vision classique de son étiologie repose sur une incapacité à utiliser les lipides qui serait causale dans la prise de poids. Or l’observation relativement récente d’un alignement étroit de la balance lipidique sur la balance énergétique suggère fortement que le niveau d’activité physique, en tant qu’élément le plus modulable de la dépense énergétique totale, pourrait jouer un rôle clef dans le devenir des lipides alimentaires. Le corollaire direct de cette observation est que l’incapacité à utiliser les lipides en tant que substrat, observée chez les sujets obèses et post-obèses, pourrait être secondaire à l’adoption généralisée d’un mode de vie sédentaire. Toutefois, nous disposons à ce jour de peu de données concernant la physiologie de l’inactivité physique. Le but majeur de ce travail de thèse a été de déterminer chez l’homme et la femme normo-pondérés si l’inactivité physique altère la régulation des balances énergétique et oxydative des lipides impliquées dans la régulation du poids et de caractériser les mécanismes sous-jacents. Pour cela, nous avons soumis des sujets femme et homme sains sans aucune prédisposition génétique à l’obésité à 2 et 3 mois d’inactivité physique, respectivement, en utilisant le modèle de l’alitement prolongé. Nous avons montré que lors de longues périodes d’inactivité physique, l’énergie ingérée est diminuée proportionnellement à la dépense énergétique totale sous l’effet de signaux satiétogènes dont la leptine. Ainsi la balance énergétique peut-être maintenue sur le long terme. Néanmoins, l’inactivité physique altère l’homéostasie des macronutriments avec une répartition des lipides au profit du stockage et entraîne le développement d’une insulino-résistance. Cette diminution de l’oxydation lipidique totale est probablement due, en partie, à la diminution du transport des acides gras dans le myocyte et la mitochondrie. L’inactivité physique induit aussi une augmentation de l’absorption intestinale et/ou une diminution de la clairance plasmatique des acides gras exogènes résultant en une hypertriglycéridémie et un ”spill-over ” accru des acides gras libres provenant de l’hydrolyse des lipoprotéines par la lipoprotéine lipase. De manière intéressante, l’inactivité physique diminue l’oxydation des acides gras alimentaires saturés (palmitate) mais pas celle des acides gras monoinsaturés (oléate). Puisque les acides oléique et palmitique alimentaires semblent avoir une absorption, un acheminement et une captation par les tissus périphériques similaires, l’inactivité physique altèrerait la répartition des acides gras saturés au profit d’un stockage au niveau musculaire. Cette hypothèse semble étayée par la relation négative obtenue entre la réduction d’oxydation du palmitate et la quantité de lipides au niveau musculaire. Ce résultat est d’autant plus intéressant lorsque l’on considère la relation établie entre l’insulino-résistance et les triglycérides intramusculaires. Ainsi, l’inactivité physique, indépendamment des changements de la balance énergétique, induit chez des individus sains des caractéristiques physiologiques proches de celles que l’on observe chez des sujets obèses. Ces observations soutiennent notre hypothèse selon laquelle la sédentarité serait une des causes majeures de l’étiologie de l’obésité. De plus amples études sur les mécanismes impliqués dans le stockage préférentiel des acides gras saturés dans les triglycérides intramusculaires et l’impact sur la réponse à l’insuline en conditions d’inactivité physique sont cependant requises afin d’étendre notre compréhension sur l’interaction entre régime alimentaire et activité physique dans le développement de l’obésité et du diabète. En testant l’efficacité de deux protocoles d’entraînement d’exercice physique (résistif versus résistif et aérobic) pour contrer les effets délétères de l’inactivité physique, nos résultats ont mis en avant le rôle clef de la dépense énergétique dans la régulation de l’oxydation lipidique totale. Toutefois, nous pensons que l’inefficacité de l’entraînement physique observée sur le maintien de l’oxydation des acides gras exogènes serait plutôt due à une faible activité de type spontanée (tout type de mouvement) qu’à une dépense énergétique insuffisante induite par l’exercice physique. Ainsi, l’activité physique de type structurée ou spontanée influencerait différemment le métabolisme lipidique. Ceci ne représente qu’une hypothèse à ce jour et des études supplémentaires sur la physiologie de l’exercice, de l’activité physique non structurée mais aussi de l’inactivité physique sont clairement requises. Le modèle de l’alitement prolongé semble approprié pour de telles investigations.