Stratégies de recherche alimentaire d’oiseaux marins vulnérables dans le Benguela
Auteur / Autrice : | Lorien Pichegru |
Direction : | David Grémillet, Peter Ryan, Yvon Le Maho |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Physiologie et biologie des organismes, populations, interactions |
Date : | Soutenance en 2008 |
Etablissement(s) : | Université Louis Pasteur (Strasbourg) (1971-2008) |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Dans un contexte de changements globaux rapides, il est crucial de comprendre les mécanismes de recherche alimentaire des prédateurs marins supérieurs afin de déterminer leur capacité d’adaptation face à la variabilité environnementale, dans le but de prédire les conséquences de ces changements sur la dynamique de leurs populations et de définir des mesures de conservation appropriées pour ces espèces menacées et les réseaux trophiques auxquels elles participent. Dans l’upwelling du Benguela, en Afrique du Sud, les fous du Cap (Morus capensis) et les manchots du Cap (Spheniscus demersus) sont vulnérables d’extinction et font face depuis une dizaine d’années au déplacement vers le sud-est de leurs proies principales, les sardines (Sardinops Sagax) et les anchois (Engraulis encrasicolus), sous l’influence probable des changements climatiques. Nous avons effectué une étude détaillée des stratégies de recherche alimentaire des fous du Cap au moyen d’enregistreurs électroniques miniaturisés portés par ces oiseaux tout au long de leurs voyages en mer, ainsi que des suivis de leur régime alimentaire et de l’abondance et de la distribution de leurs proies dans le Benguela. Nous avons montré que les fous du Cap sont capables d’augmenter substantiellement leur effort de prospection alimentaire face à une faible disponibilité des proies naturelles sur la côte ouest de l’Afrique du Sud. Ils restent pourtant limités dans l’étendue de leur aire de recherche alimentaire par la nécessité de retourner régulièrement à la colonie pour nourrir leur progéniture. Ils se tournent alors vers des proies de substitution, des déchets de pêche au merlu (Merluccius spp. ) de faible valeur nutritive. Ces proies représentent de la « Junk-food » pour les poussins de fous et ont un impact négatif sur leur survie. Même s’ils permettent aux adultes de réduire significativement leur effort de prospection en hiver, les déchets de pêche ne compensent donc pas la faible disponibilité des sardines et des anchois au cours de la saison de reproduction. Nous avons déterminé que pour une densité des proies naturelles inférieure à 25 g m-2 dans l’aire de nourrissage des fous du Cap, les adultes reproducteurs ne parviennent plus à équilibrer leur balance énergétique et échouent massivement au cours de la reproduction. Poussés par la fidélité à leur site de reproduction, les fous du Cap étudiés reviennent cependant tenter de se reproduire dans des conditions environnementales sub-optimales et se retrouvent victimes d’un piège écologique. La structure sociale d’une espèce peut donc ralentir son adaptation aux changements environnementaux. Les petits poissons pélagiques, sardines et anchois, sont désormais rares au large de la côte ouest de l’Afrique du Sud et la compétition des oiseaux marins du Benguela avec les pêcheries industrielles à la senne atteint son paroxysme. La biotélémétrie, particulièrement le suivi GPS des fous et des manchots du Cap en mer, nous a permis de définir leurs zones d’alimentation de manière très précise. En nous basant sur ces données et sur des suivis des activités de pêche à la senne, nous proposons des mesures de conservation qui prennent en compte les zones d’alimentation des prédateurs supérieurs concernés tout en considérant les besoins économiques locaux. Ces zones permettront le maintien des populations d’oiseaux marins menacées et nos données alimenteront également les plans de gestion écosystémique des pêcheries dans le but d’une exploitation durable des ressources naturelles