Thèse soutenue

Les danses animalières des Malinké de Haute-Guinée

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Auteur / Autrice : Caroline Dervault
Direction : Serge A. M. Tornay
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anthropologie de l'objet
Date : Soutenance en 2008
Etablissement(s) : Paris, Muséum national d'histoire naturelle
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris)
Jury : Président / Présidente : Michael Houseman
Examinateurs / Examinatrices : Éric Jolly, Manuel Valentin
Rapporteurs / Rapporteuses : Philippe Jespers

Mots clés

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Résumé

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Alors que les pays occidentaux connaissent un certain engouement pour ce que l’on appelle de manière très générale « la danse africaine », on ne sait bien souvent pas vraiment de quoi il s’agit. En effet, l’une des particularités de la danse en Afrique, est qu’elle révèle bien plus d’informations qu’elle ne le laisse à voir. Le rapport entre la forme et le sens que peut prendre une danse est rarement accessible d’emblée. Le sens des danses africaines se situe bien souvent à un carrefour entre le visible, le lisible et l’invisible. Derrière la performance se dissimulent de nombreuses significations sous-jacentes invisibles au premier coup d’œil, et en particulier lorsqu’elles évoquent le monde animal. C’est ce qu’a révélé l’étude des danses animalières des Malinké de la région de Haute-Guinée. Celle-ci révèle que lorsqu’il est abordé, le thème animal dévoile tout un ensemble de significations multiples à la fois sociales, culturelles, historiques et émotionnelles chez le spectateur, et qu’il apparaît pertinent dans l’étude même de l’homme. On s’aperçoit, en effet, que la représentation animale dans la danse joue un rôle dans le processus de construction identitaire de la société malinké puisque certaines espèces servent à illustrer des traits de caractères distinctifs à l’échelle des individus ou des groupes d’individus. Si elles sont, en premier lieu, l’expression des rapports qu’une société entretient avec la faune environnante, les danses animalières évoquent aussi en filigrane des qualités singulières des danseurs et/ou de leur groupe d’âge. Mais comment saisir le sens, les raisons et les effets des chorégraphies animalières ? Ce questionnement a conduit élaborer un cadre d’analyse méthodologique et théorique et à mettre en évidence un canevas des danses animalières ainsi que des modalités de représentation de l’animal à travers la danse. Selon ce canevas théorique, les danses animalières fonctionnent en mobilisant des représentations ou modèles mentaux qui structurent la réalité sociale à partir de traits saillants de comportements animaux, qui sont sélectionnés par les Malinké pour illustrer une situation relationnelle, puis sont mobilisés dans la chorégraphie. Les danses animalières transforment ces représentations animales en affirmations identitaires, à travers la performance réalisée et les émotions qu'elle suscite, tant au niveau des danseurs que des spectateurs, et tant au niveau individuel que collectif. Les chorégraphies mobilisent en même temps qu'elles suscitent des représentations sur les animaux mais aussi sur l'homme. Il en ressort que la société humaine ne se calque pas sur le monde animal mais refaçonne une image animale en fonction de ses propres présupposés. Les représentations animales peuvent être envisagées comme des métaphores des relations sociales dans un contexte précis, voire comme un prétexte. En lui fournissant des modèles, les danses animalières permettent à l’homme de se penser, de faire sa place dans l’ensemble des relations qui le définissent, de s’affirmer voire l’incitent à se surpasser. C’est finalement l’homme qui est en représentation à travers la représentation animale chorégraphiée. L’impact du message identitaire effectif passe par son caractère spectaculaire et par sa mise en scène. Encore insuffisamment exploitée, la danse africaine offre une clef d’entrée à l’approche des sociétés dans toute leur dimension historique et culturelle.