Impact des seuils et barrages sur la migration anadrome du saumon atlantique (Salmo salar L. ) : caractérisation et modélisation des processus de franchissement
Auteur / Autrice : | Olivier Croze |
Direction : | Pierre Élie, Puy Lim |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Fonctionnement des écosystèmes et agrosystèmes |
Date : | Soutenance en 2008 |
Etablissement(s) : | Toulouse, INPT |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
En France, comme dans de nombreux pays, les seuils et barrages en rivière se comptent par dizaines de milliers. Ces ouvrages exercent des perturbations multiples sur la faune piscicole, notamment en modifiant la qualité de l’eau et de l’habitat des poissons. Mais ils constituent surtout de véritables obstacles à leur libre circulation, les espèces migratrices étant les plus touchées. Afin de limiter leur impact, différents types de passe à poissons ont été développés depuis plusieurs décennies. Cependant, l’évaluation de leur efficacité n’est que plus récente : les premiers résultats, plutôt décevants, ont mis en exergue un réel besoin de progrès dans ce domaine. L’amélioration de la circulation des poissons au niveau des obstacles, même déjà équipés d’une passe à poissons, implique une meilleure identification des facteurs influençant leur franchissabilité, comme des processus mis en œuvre lors du franchissement. Le saumon atlantique, Salmo salar L. , a été retenu comme modèle biologique, du fait de ses longues migrations en milieu continental impliquant une confrontation à de multiples obstacles migratoires. La démarche adoptée dans cette thèse a consisté à acquérir un jeu conséquent de tentatives de franchissement au niveau d’une série d’obstacles. Deux cours d’eau ont ainsi été retenus pour ce travail, l’Aulne, un petit fleuve côtier, et la Garonne, troisième fleuve français par son débit. Ces fleuves présentent la particularité d’être fortement équipés en seuils et barrages de configurations variées. Le suivi des déplacements du saumon sur l’Aulne et la Garonne a été effectué par télémétrie (radiopistage), seule technique permettant à la fois d’identifier les passages en amont et d’étudier le comportement des poissons au cours du blocage. La première étape du travail a consisté à caractériser l’impact des barrages étudiés. Il ressort de l’analyse individuelle une grande variabilité des taux de franchissement et des retards induits à la migration entre sites, mais aussi pour un même site entre les différentes années. Dans les deux cas, l’effet cumulatif des obstacles semble considérable puisqu’il constitue le facteur majeur de ''perte'' lors de la migration anadrome sur ces deux cours d’eau. L’analyse de la variabilité entre sites a permis d’identifier différents facteurs susceptibles d’influencer la franchissabilité des obstacles étudiés, qu’ils soient liés au cours d’eau (largeur, module), à l’obstacle (configuration au fil de l'eau vs en dérivation, hauteur), au dispositif de franchissement (lieu d’implantation, débit, débit complémentaire d'attrait, type, qualité du dimensionnement) ou au poisson (longueur). Ces facteurs ne rendent compte, à eux seuls, que partiellement de la variabilité observée. Parmi les types de passe les moins performants sont rencontrées d'anciennes passes à bassins à jet plongeant mal dimensionnées mais aussi les deux ascenseurs étudiés, résultat essentiellement lié à l'un seul d'entre eux, celui de Golfech, dont l'efficacité est particulièrement faible. Un suivi fin des déplacements de saumons radiomarqués au niveau de ce dernier ascenseur a permis d’identifier les causes de son manque de performances ; certaines d'entre elles sont en relation avec les contraintes imposées par ce type de dispositif qui implique un piégeage des poissons. L’étude de la variabilité de la franchissabilité d’un obstacle pour un même site a été abordée via une modélisation par méthode d’analyse de survie. Ce modèle, développé dans un cadre bayesien adapté au traitement des échantillons de petite taille, met en compétition deux processus : le franchissement et le renoncement, ce dernier correspondant au dernier repli vers l’aval sans que le poisson ne se représente à l’obstacle. Appliqué à titre d'illustration à un obstacle de Garonne (le Bazacle, à Toulouse), il a permis de mettre en évidence l’effet négatif exercé par le débit de la rivière, la température, un état de santé des saumons médiocre et la durée de blocage sur la probabilité de franchir cet obstacle. Le renoncement serait quant à lui favorisé sur ce site par de faibles teneurs en oxygène dissous (variable indicatrice de qualité d’eau), mais aussi par des arrivées précoces au pied du site. Le modèle original développé ici présente l’intérêt d’être généralisable : il peut donc être utilisé pour réaliser des inférences à partir de tout jeu de données d'observation du comportement de ''franchissement / renoncement'' de poissons en migration face à un obstacle, ce comportement étant par ailleurs influencé par des covariables. Ce modèle constitue donc un outil d’aide adapté à l’évaluation de la franchissabilité d’un obstacle comme à la compréhension des facteurs qui la régissent.