Auteur / Autrice : | Chadi Abdallah |
Direction : | Jean Chorowicz |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Environnement continental |
Date : | Soutenance en 2007 |
Etablissement(s) : | Paris 6 |
Résumé
Parmi les aléas naturels, les mouvements de terrain (MT) sont probablement les plus nuisibles à l’environnement naturel et humain, notamment dans les pays méditerranéens, incluant le Liban qui représente un bon cas d’étude de région montagneuse. Ce phénomène n’a pas été étudié à l’échelle régionale bien qu’il affecte de vastes zones dans ce pays, et les cartes d’aléa manquent encore. La recherche présentée ici est consacrée à l’utilisation des techniques de télédétection et des systèmes d’informations géographiques (SIG), pour l’étude des MT au Liban. La première partie passe en revue les connaissances existantes sur le thème des mouvements de terrain (MT), plus spécifiquement dans la région méditerranéenne, et définit les lacunes de recherche. Elle expose les divers types existants de MT, leurs magnitudes, les agents causatifs, et leurs effets. Elle clarifie la terminologie utilisée pour les MT (aléa, susceptibilité, risque, etc. ), et compare les méthodes les plus utilisées pour la cartographie de l’aléa/susceptibilité aux MT. Elle présente aussi un état des avantages et problèmes de la télédétection et du SIG dans les études de mouvements de terrain, en insistant sur les voies possibles de recherche. La deuxième partie est consacrée à la description détaillée de la région d’étude qui couvre les versants méditerranéens du nord du Liban central. Les caractéristiques physiques/morphodynamiques et socio-économiques de cette région sont exposées, ainsi que les aléas naturels, les événements de MT, les impacts socio-économiques et les mesures de conservation. Toutes les études sur l’aléa MT au Liban sont revisitées. La région d’étude, s’étendant de la côte méditerranéenne jusqu’à 3000 m d’altitude, couvre à peu près 36 % de la superficie totale du Liban. Elle est représentative de la diversité géo-environnementale de ce pays en termes de géologie, sol, hydrographie, occupation du sol et climat. Elle se caractérise par des activités humaines problématiques (par exemple une expansion urbaine chaotique, la recharge artificielle des eaux souterraines, un surpâturage, des incendies de forêt), accroissant la dégradation de l’environnement et induisant les MT, avec un contrôle gouvernemental minime. La troisième partie compare l’efficacité de différents capteurs satellitaires à résolutions variées (Landsat TM, IRS, SPOT4) et diverses techniques de traitement d’image (composition colorée, fusion, analyse en composantes principales ACP, vision stéréoscopique) pour la détection visuelle des mouvements de terrain classés en glissements, éboulements de blocs rocheux et de débris, et coulées de boue. Les résultats ont été validés sur le terrain et en analysant des images IKONOS (1 m) acquises en certaines localités menacées par des MT sur de longues périodes. Ensuite, les niveaux de précision de la détection des MT à partir des images satellitaires ont été calculés. Cette étude a montré que l’anaglyphe produit à partir des images panchromatiques stéréo SPOT4 reste l’outil le plus efficace grâce aux caractéristiques 3D jouant un rôle essentiel dans l’interprétation visuelle et montrant un niveau de précision (pourcentage des MT détectés et vérifiés sur le terrain) maximal de 69 %. De plus, l’image de fusion Landsat TM-IRS, calculée par ACP, fournit des résultats de détection des MT meilleurs que les autres techniques, avec un niveau de précision de 62 %. Les erreurs d’interprétation fluctuent non seulement en fonction de la technique de traitement utilisée, mais aussi en fonction des types de MT. Elles sont minimes quand l’anaglyphe (3D) SPOT4 est pris en considération, variant de 31 % (glissements), 36 % (éboulements de blocs rocheux et de débris) à 46 % dans le cas des coulées de boue. La quatrième partie explore les relations entre l’occurrence de MT et les paramètres du terrain. Ces paramètres sont: 1- les facteurs de prédisposition, comme l’altitude, la pente en gradient, l’aspect de pente, la courbure de pente, la lithologie, la proximité aux failles, le type de karst, la distance aux carrières, le type de sol, la distance aux réseaux de drainage, la distance aux sources, l’occupation/utilisation du sol et la proximité aux routes, et 2- les facteurs déclenchants, comme la quantité de pluies, les événements sismiques, les inondations et les incendies de forêt, qui ont été corrélés avec les MT en utilisant les approches SIG. Cette étude montre, en se basant sur les corrélations statistiques bi-variées satellitaires et SIG (corrélation Kendal Tau-b), que la lithologie est ce qui influence le plus l’occurrence des MT, puisqu’elle a la corrélation la plus élevée avec les autres paramètres (7 fois corrélée à un niveau de signification de 1 %, et 3 fois à 5 %). Elle montre aussi que les corrélations statistiques entre ces paramètres et les mouvements de terrain existent suivant l’ordre d’importance décroissant suivant : type de sol/distance aux sources (agissant de manière similaire sur l’occurrence des MT), karst/distance aux carrières/occupation/utilisation du sol, proximité aux failles, gradient de pente/proximité aux routes/inondations, événements sismiques, altitude/aspect de pente/incendies de forêt. Ces corrélations sont vérifiées sur le terrain et expliquées en utilisant des corrélations statistiques uni-variées. Par conséquent, elles peuvent être extrapolées à d’autres pays méditerranéens caractérisés par des conditions géoenvironnementales similaires. La cinquième partie propose une méthode mathématique décisionnelle (méthode analytique bi-univariée d’évaluation ou «Valuing Analytical Bi-Univariate (VABU)») qui considère deux niveaux de pondération pour la cartographie de l’aléa/susceptibilité des MT (échelle 1/50000) dans la région d’étude. La fiabilité de cette méthode est examinée sur le terrain et en la comparant avec d’autres méthodes statistiques - Valuing accumulation Area (VAA) (un seul niveau d’évaluation) and Information Value (InfoVal) (nécessitant des mesures détaillées des MT). Trois cartes de susceptibilité sont dérivées en utilisant les facteurs conditionnant l’occurrence des MT, tandis que les cartes d’aléa sont produites à partir des facteurs déclenchants. Les valeurs de coïncidence de superposition des cartes de susceptibilité sont de 47,5 % (VABU/VAA), 54 % (VABU/InfoVal) et 38% (VAA/InfoVal), respectivement. L’accord entre les cartes d’aléas montre des valeurs proches de celles des cartes de susceptibilité, variant entre 36,5 % (VAA/InfoVal), 39 % (VABU/VAA), et 44 % (VABU/InfoVal). La validation sur le terrain indique que la précision totale des cartes de susceptibilité produites varie entre 52,5% (méthode VAA), 67,5% (méthode InfoVal) et 77,5% (méthode VABU). Cela démontre l’efficacité de notre méthode qui peut être adoptée pour une cartographie prédictive de l’aléa et de la susceptibilité des MT dans d’autres régions au Liban, et peut être aussi aisément extrapolée en utilisant les capacités fonctionnelles du SIG. La sixième partie prédit la distribution géographique et le volume des blocs rocheux (m3) dans la région d’étude en utilisant la modélisation suivant un arbre décisionnel. Une telle cartographie est indisponible au Liban, mais aussi dans d’autres pays qui portent plutôt leur effort sur la recherche des glissements plutôt que les autres types de MT. Plusieurs modèles d’arbres décisionnels ont été développés en utilisant, (1) tous les paramètres de terrain, (2) les paramètres topographiques uniquement, (3) les paramètres géologiques, et en adoptant plusieurs techniques de traitement. Le meilleur arbre de régression combine tous les paramètres et explique 80 % de la variabilité dans les mesures des blocs rocheux sur le terrain. Le modèle construit en utilisant les quatre paramètres géologiques (lithologie, type de sol, proximité aux failles et type de karst) parait aussi intéressant car il classe 68 % des blocs rocheux tout en se référant à un petit nombre de données d’entrée (4 paramètres). La carte vi produite de ‘prédiction quantitative des blocs rocheux’ à l’échelle du 1/50 000 apparait extrêmement utile pour la décision, aidant à l’adoption des mesures de conservation afin de réduire l’occurrence de movements nuisibles de blocs rocheux. La septième partie s’intéresse à la surveillance de l’activité des MT à travers l’intégration des données spatiales radar et des techniques GPS (Système de positionnement global). Les données radar ERS sont traitées en utilisant les techniques InSAR et des réflecteurs permanents. Cette analyse montre des difficultés pour la détection des MT. Cependant, elle est jusqu’à présent préliminaire, et un plan de travail futur prendra en considération d’autres traitements pour la détection des déplacements. D’un autre côté, une installation GPS a été effectuée dans la région de Hammana, un village libanais menacé par un grand glissement. Deux campagnes ont été rassemblées, mais les résultats manquent encore puisqu’il n’y a pas des données accumulées suffisantes. Plus d’observations sont nécessaires afin de construire une représentation compréhensive de la direction et de la vitesse du mouvement.