La réforme des cadres de l’action publique ou la fabrique d’un « nouveau » corps des Ponts et Chaussées : impératifs managériaux, logiques administratives et stratégies corporatistes (fin du XXe siècle)
Auteur / Autrice : | Julie Gervais |
Direction : | Gilles Pollet |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Science politique |
Date : | Soutenance en 2007 |
Etablissement(s) : | Lyon 2 |
Mots clés
Résumé
Le Journal officiel du 16 avril 2002 annonce la création d’un nouveau grand corps de l’État dont les statuts regroupent les anciens corps des Ponts et Chaussées, de l’Aviation civile, de Météo France et de l’Institut géographique national. Créé en 1716, le corps des Ponts et Chaussées réapparaît ainsi sous le même nom mais avec des contours redéfinis. Cette fusion des quatre corps techniques supérieurs du ministère de l’Équipement s’accompagne d’une longue réflexion sur l’identité de cette nouvelle entité, à laquelle il s’agit désormais d’insuffler un « esprit de corps » propre à unifier ses membres. C’est dans la figure de l’« ingénieur manager » que ces hauts fonctionnaires entendent l’incarner. Dans cette perspective, une vaste réforme des enseignements est entreprise au sein de l’École nationale des Ponts et Chaussées, qui vise à la création d’une formation initiale au management de l’action publique. Ce processus de réforme, qui s’étend sur plus de sept années, est mené au nom de l’impératif managérial et sous les auspices de la « modernisation » de l’État. Il révèle néanmoins, à l’analyse, des enjeux d’un autre ordre, mêlant des logiques corporatistes et administratives qui s’opposent et se complètent tout au long de cette fabrique. Étudier cette « réforme des cadres de l’action publique » (au double sens du mot « cadre »), c’est restituer les enjeux symboliques et matériels des négociations interministérielles sur les statuts, c’est également mettre au jour les attendus stratégiques et les intérêts différentiels de la revendication d’une identité propre au corps des Ponts, c’est enfin donner à voir les représentations de l’action publique véhiculées par une formation au management des cadres qui s’apprêtent à la produire et à la mettre en œuvre. L’analyse de chacune des scènes où elle se construit révèle combien cette réforme ne participe pas d’un tournant néolibéral mais relève d’un processus inverse qui voit des agents de l’État tenter, au nom de l’impératif managérial, de se renforcer et de « remettre l’État au centre ».