Conception de fragments d'anticorps recombinants : application à la neutralisation de toxines animales et bactériennes
Auteur / Autrice : | Matthieu Juste |
Direction : | Philippe Billiald |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Pharmacie |
Date : | Soutenance en 2006 |
Etablissement(s) : | Tours |
Résumé
Des fragments d’anticorps recombinants à potentiel thérapeutique ont été conçus. Il s’agit de petites molécules hautement diffusibles dans les tissus, adaptées à la neutralisation de toxines d’origines animale (neurotoxines de scorpion) ou bactérienne (toxine charbonneuse). Les toxines de scorpions sont des polypeptides neurotoxiques de 30 à 70 résidus d’acides aminés, agissant avec une spécificité élevée sur différents canaux ioniques des membranes des cellules excitables. La quasi-totalité du pouvoir toxique du venin de scorpion Androctonus australis, originaire du pourtour méditerranéen, lui est conféré par trois toxines, parmi les plus puissantes neurotoxines d’origine animale (AahI, AahII et AahIII). Le seul traitement spécifique efficace est la sérothérapie basée sur l’utilisation de fragments d’anticorps polyclonaux hétérologues. Ce traitement n’a pas connu d’évolution significative depuis sa découverte et reste associé à de nombreux inconvénients : variabilité des lots, effets secondaires grâves et risques de transmission d’agents pathogènes. Un fragment d’anticorps bispécifique de type « scFv en tandem » (50 kDa) qui possède un site de reconnaissance antigénique dirigé contre la toxine AahI (ou AahIII) et un autre site dirigé contre la toxine AahII a été développé. Protéine recombinante produite en système procaryotique, cette molécule bispécifique conserve une haute affinité pour les toxines et présente la capacité de neutraliser à elle seule les effets toxiques du venin entier in vivo, dans des conditions expérimentales proches de celle d’une envenimation naturelle. Les fragments d’anticorps recombinants peuvent également avoir un intérêt pour la neutralisation de toxines bactériennes, celle du charbon en est un exemple. La maladie est une zoonose de distribution mondiale ayant pour agent étiologique Bacillus anthracis. Lorsqu’elle est diagnostiquée suffisamment tôt, elle peut être traitée par antibiothérapie. Le plus souvent, les premiers signes cliniques échappent à la vigilance des personnes infectées et l’antibiothérapie devient alors inefficace en raison de la trop grande quantité de toxine présente dans l’organisme. L’immunothérapie passive basée sur l’utilisation d’anticorps neutralisants la toxine pourrait être un traitement adjuvant efficace et complémentaire à l’antibiothérapie. Des fragments d’anticorps de primates non-humains (monovalent et bivalent), dirigés contre la toxine de Bacillus anthracis ont été conçus et caractérisés sur le plan structural et fonctionnel. Le rendement de production dans des bactéries recombinantes est élevé. Ils conservent leur activité de liaison et une affinité élevée pour l’antigène. Un test de cytotoxicité in vitro a également montré que le scFv35PA83 est neutralisant. Une séquence mimotope de l’épitope reconnu par ce scFv a été identifiée et pourrait avoir un potentiel vaccinal. Des souris immunisées avec le peptide d’intérêt développent des anticorps anti-PA, neutralisants partiellement les effet létaux de la toxine dans un test de neutralisation in vitro. En parallèle, une méthode rapide, simple et générale a été développée permettant de cloner plus facilement l’ADNc d’un domaine variable fonctionnel de la chaîne légère (Analytical Biochemistry 349 (2006) : 159-161). En effet, la présence d’un ARNm aberrant codant une région Kappa non fonctionnelle, exprimé par les cellules de myélome utilisées pour produire les hybridomes, rend souvent délicat le clonage de l’ADNc correspondant au VL d’un anticorps monoclonal.