Thèse soutenue

Les histoires des toxicomanes : narrations et lectures dans les addictions

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Olivier Taïeb
Direction : Marie Rose Moro
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance en 2006
Etablissement(s) : Paris 13

Résumé

FR  |  
EN

Objectifs : Face à la multiplicité des discours et des histoires sur la toxicomanie, cette recherche a pour objectifs (1) de décrire les modèles explicatifs des patients toxicomanes avec une méthode issue de l’anthropologie médicale et de la psychiatrie transculturelle (Kleinman), (2) de définir les facteurs (sociodémographiques, migratoires et psychiatriques) dont dépendent ces modèles et (3) de montrer, en s’appuyant principalement sur la notion d’identité narrative de Ricœur, que les patients tentent ainsi de mettre en intrigue leurs histoires de vie. Patients et méthode : 70 patients présentant une dépendance actuelle à des drogues selon le DSM-IV ont été évalués à l'hôpital Avicenne, en Seine-Saint-Denis, par un entretien comprenant l’Explanatory Model Interview Catalogue (Weiss) et d’autres instruments. Résultats : Les modalités d’expression de la souffrance, les représentations des troubles, les théories étiologiques et les itinéraires thérapeutiques sont hétérogènes. Une isomorphie est retrouvée entre modalités d’expression de la souffrance, profil de sévérité de l’addiction et théories étiologiques montrant la circularité de la causalité. Causes et conséquences sont souvent indiscernables dans les discours. Les ressemblances entre les récits des patients et la littérature spécialisée sur les addictions illustrent ce que Ricœur a appelé le cercle de la mimèsis. Discussion : Les enjeux psychopathologiques de l’hétérogénéité des modèles explicatifs sont à prendre en compte dans les rencontres thérapeutiques, ces modèles ne devant être ni réifiés ni figés pour être accessibles au changement. A partir de la théorie narrative de Ricœur et de théories de la lecture, est mise en avant l’idée que les patients doivent être considérés comme narrateurs et personnages de leurs histoires de vie (mimèsis I et II) mais aussi comme lecteurs d’histoires multiples et lecteurs de leurs propres troubles (mimèsis III). Les patients ont donc besoin du secours de la littérature au sens large pour rendre intelligible leur vie et construire leurs identités. L’appropriation de cette littérature doit rester critique pour éviter l’errance entre plusieurs modèles identificatoires, la menace de la perte d’identité ou le repli identitaire.