Thèse soutenue

Pour une sociologie des societes civiles immobilières : logiques patrimoniales, dynamiques familiales et professionnelles, identités socio-juridiques : le cas de la région lyonnaise (1978-1998)

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Auteur / Autrice : Sébastien Ruz
Direction : Yves Grafmeyer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance en 2005
Etablissement(s) : Lyon 2

Résumé

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Technique juridique destinée à l’acquisition et à la gestion d’un patrimoine immobilier, la société civile immobilière (SCI) remporte depuis le début des années 1980 un vif succès. Son recours concerne aussi bien des particuliers, plus ou moins aisés, que des praticiens du droit, du chiffre, du patrimoine et de l’argent, soucieux des intérêts de leurs clients. Les premiers peuvent être qualifiés d’utilisateurs et les seconds de concepteurs. A ce titre, le phénomène sociétaire représente un phénomène économique, juridique, urbain et social de premier plan que les spécialistes des sciences sociales n’ont jamais examiné jusqu’à présent. Le tout premier défi de ce travail consiste ainsi à convertir un objet juridique et financier, proche de l’artefact, en objet sociologique. La réflexion menée emprunte aux principes théoriques et méthodologiques des sociologies juridique, économique et des techniques. En détenant des parts de société, en étant propriétaire d’un bien immobilier dématérialisé, le porteur de parts jouit d’une identité socio-juridique singulière. Il possède un statut hybride, à la croisée du propriétaire immobilier et mobilier, ce qui le positionne, de façon plus ou moins consciente, au cœur d’un processus contemporain de rationalisation des pratiques immobilières et patrimoniales. Cette étude vise donc en partie à compléter la connaissance des comportements des propriétaires-bailleurs. L’emploi de la technique sociétaire illustre et explique d’une part une professionnalisation du statut de propriétaire immobilier, celui-ci étant défini comme un acteur à projets, plus ou moins inventif, évoluant dans des environnements mouvants et capable de formuler des scénarios gestionnaires ; il embrasse une carrière. Toutefois, il peut se faire aider dans la définition de ses projets, stratégies et tactiques par des experts en questions patrimoniales ; il peut intégrer des filières pragmatiques. L’emploi ou le suremploi de cette technique symbolise dès lors aussi une professionnalisation grandissante mais diffuse des concepteurs et des métiers du conseil patrimonial. Ils s’inscrivent dans un marché porteur et dans un système interprofessionnel où les rivalités marchandes et intellectuelles le disputent aux collaborations, coopérations et synergies. L’interactivité, la performance, la confiance, l’honnêteté, sont, parmi d’autres, les axes de la relation qui unit porteurs de parts et praticiens. La diffusion de l’information sociétaire et sa traduction matérielle transitent par des instances socialisatrices diverses et variées. Les usages et représentations de la technique sociétaire vont d’autre part dans le sens d’une acculturation juridique. Le porteur de parts assimile et jongle avec des normes sociétaires qui entrent parfois en concurrence avec d’autres normes juridiques, mais plus encore avec des normes sociales, culturelles, familiales, contractuelles, éthiques ou morales préexistantes – un « déjà-là » normatif. Le syncrétisme s’avère peu ou prou réussi. L’autre grande ambition de ce travail est ce faisant, par induction, d’observer la place laissée aux règles juridiques objectives au sein des systèmes normatifs individuels et collectifs, bref de voir comment se joue le phénomène d’internormativité. Entre logique déontique, légalisme, rationalités, coutumes et croyances. Les règles sociétaires peuvent être comparées à des règles contractuelles qui participent à la construction d’une dynamique d’action collective – sa scénarisation –, ou bien nourrissent son illusion. Elles peuvent tout aussi bien structurer que désorganiser des groupes de porteurs de parts associés ou les interrelations socio-patrimoniales de ces derniers.