Thèse soutenue

Conséquences d'un refroidissement climatique sur le comportement de radionucléides dans les sols du Barrois

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Auteur / Autrice : Sophie Maillant
Direction : Jean-Louis Morel
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences agronomiques
Date : Soutenance en 2005
Etablissement(s) : Vandoeuvre-les-Nancy, INPL

Résumé

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Dans le cadre de l'étude de sûreté du stockage en couche profonde de déchets radioactifs à vie longue menée par l'Andra, il est nécessaire de prévoir le comportement des polluants dans les sols qui seront présents dans plusieurs dizaines de milliers d'années, en réponse aux changements climatiques. Une méthode de pédologie prospective est proposée pour répondre à cette problématique et est appliquée au cas particulier d'une région de plateau calcaire, le Barrois, pour un refroidissement climatique entraînant une glaciation et pour des radionucléides supposés mobiles (iode (I) et technétium (Tc)). Cette méthode repose sur l'étude de sols analogues qui proviennent de régions similaires à la région de référence, en termes géologiques et topographiques mais dont le climat actuel pourrait correspondre au climat périglaciaire futur de la région de référence. Deux biomes principaux de climats froids et secs, steppe-toundra et forêt boréale, ont été choisis, complétés par un biome froid et humide (étage montagnard) afin de couvrir une large gamme de refroidissements climatiques. Les sols analogues ont été prélevés en forêt boréale, en steppe froide et à l'étage montagnard sur des roches-mères calcaires. Des scénarios d'évolution ont été proposés et des cartes représentant ces scénarios d'évolution ont été éditées pour chaque biome. Compte tenu de son importance en tant que produit de la pédogenèse et facteur de rétention de certains éléments, le compartiment matière organique (MO) a été pris comme indicateur de l'impact du climat sur les sols. La rétention de I et de Tc dans les sols analogues a été caractérisée à partir d'incubations de terres à la capacité au champ. Enfin, le suivi de l'évolution in situ de la rétention de l'iode stable dans une tourbière a permis de préciser le devenir à moyen terme de cet élément en présence de matière organique en conditions froides. Les résultats montrent des sols brunifiés calcaires peu épais et peu évolués en forêt boréale et des chernozems en steppe froide. Dans ces deux biomes, les sols hydromorphes présentent une accumulation de MO aromatique dans la fraction humifiée. A l'étage montagnard, la décarbonatation est assez importante pour permettre le développement de sols plus variés, offrant une MO différente de celle des autres biomes. En biome froid, l'humidité du climat détermine donc les différences de fonctionnement entre les sols. Les scénarios d'évolution établis à partir de ces résultats indiquent que les conditions périglaciaires favoriseraient la présence de sols proches des sols actuels (Leptosols rendziques et des Cambisols eutriques ou calcariques), notamment en biome boréal. En biome de steppe-toundra, la présence d'un pergélisol pourrait favoriser l'hydromorphie. Dans les deux biomes, des sols hydromorphes formés sur matériau marneux seraient susceptibles de contenir des teneurs élevées de MO (tourbières alcalines ou peu acides). Nous avons montré que la dessiccation du sol pourrait favoriser la rétention de I et Tc sur la phase solide en conditions aérobies (Kd > 1 l kg-1 dans les sols de forêt boréale après un an d'incubation). Tc serait immobilisé dans les sols de steppe froide tandis que I serait davantage retenu dans les sols en forêt boréale. Dans ces deux biomes, les sols les plus favorables à la rétention de I et de Tc seraient des sols hydromorphes organiques situés dans les fonds des vallées sur matériaux marneux. Ces résultats ont été traduits en cartes de rétention pour chacun de ces éléments, pour les deux biomes périglaciaires. Enfin, dans la tourbière, l'accumulation de I à la surface (Kd multiplié par 6 en 15 ans) a été associée à la présence de composés polyphénoliques dans la tourbe en cours d'humification. Les cypéracées (Carex sp. ) ont été identifiées parmi les espèces végétales présentes sur le site, comme étant celles qui accumulent les plus grandes quantités d'iode. En conclusion, la démarche prospective reposant sur l'analogie et des études en laboratoire et in situ a permis de prévoir l'évolution des sols sous l'influence d'un refroidissement climatique et de prévoir le devenir de radioéléments à vie longue en fournissant les valeurs des paramètres pour des biosphères froides devant être utilisés dans les codes de calculs de dose des études de sûreté