Thèse soutenue

Mécanismes d'action des AINS en relation avec la prolifération cellulaire et l'apoptose

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Auteur / Autrice : Mikaël Daouphars
Direction : Jean-Yves Jouzeau
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie - Santé - Environnement. Sciences du médicament
Date : Soutenance en 2004
Etablissement(s) : Nancy 1
Partenaire(s) de recherche : Autre partenaire : Université de Nancy I. UFR Sciences pharmaceutiques et biologiques

Résumé

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Les études épidémiologiques ont suggéré que la consommation régulière d'anti-inflammatoires non stéroi͏̈diens (AINS),et plus particulièrement celle d'aspirine ou de sulindac, serait capable de diminuer le nombre de polypes chez lespatients porteurs de polypose familiale. Elle serait également associée à une incidence moitié moindre du cancercolorectal, y compris en termes de mortalité. L'étude de biopsies digestives a montré que les tissus tumoraux produisent des quantités exagérées de prostaglandines E2 par rapport aux tissus sains et que ceci est dû à une expression anormalement élevée de COX-2, tant au niveau de la protéine que de ses messagers. De plus, l'activation d'oncogènes et la transformation cellulaire sont étroitement associées à l'expression de COX-2. Ainsi, même si l'action des AINS pourrait ne pas être univoque (blocage de l'activation métabolique de carcinogènes par les COX par exemple),l'inhibition de COX-2 pourrait en être un élément essentiel, d'autant que la transfection de COX-2 dans les cellulesépithéliales digestives s'accompagne de nombreuses modifications fonctionnelles dont une résistance à la mort cellulaire programmée (apoptose). La chimioprévention du cancer colorectal par les AINS semble donc trouver des bases scientifiques indéniables et a bénéficié d'un nouvel essor avec le développement d'inhibiteurs sélectifs de COX-2 doués d'une tolérance digestive améliorée, davantage compatible avec un usage prolongé. Le premier objectif de ce travail était de comparer les effets sur la prolifération cellulaire et l'apoptose, d'AINS ayant des profils de sélectivité différents vis-à-vis des isoenzymes de la COX, sur des lignées humaines de cancer colorectal,elles-mêmes différentes par leur statut COX. Les quatre lignées humaines de cancer colorectal (HT29, Caco-2, HCT15, HCT116) ont été caractérisées en termes de différenciation et de prolifération cellulaires, d'expression des COXs. Les effets d'AINS classiques (aspirine, indométacine, kétoprofène, sulfure de sulindac) et d'inhibiteurs sélectifs de COX-2 (célécoxib, NS-398) ont ensuite été étudiés vis-à-vis de la prolifération, du cycle-cellulaire et de l'apoptose. Cette étude a montré que les AINS, à l'exception de l'aspirine et du kétoprofène, inhibaient la croissance des différentes lignées cellulaires à une concentration supérieure ou égale à l0-4M. Lorsqu'il existait, cet effet antiprolifératif était généralement associé à un blocage du cycle cellulaire en phase G1, en particulier pour le sulfure de sulindac et le NS-398. Cependant, à cette concentration (I0-4M), seul le sulfure de sulindac favorisait l'apoptose dans toutes les lignées colorectales humaines, y compris la lignée HCT15 n'exprimant pas les COXs. Le second objectif de ce travail était de mettre en évidence les mécanismes impliqués, d'autant que les effets observés sur le cycle cellulaire, d'une part, et sur l'apoptose, d'autre part, suggéraient respectivement la participation de mécanismes COX-dépendants et COX-indépendants. Compte tenu de la différence de structure chimique entre le sulfure de sulindac (AINS carboxylique) et le NS-398 (arylsulfonamide), et comme leurs effets antiprolifératifs n'étaient observés qu'à des concentrations nettement supérieures à celles requises pour l'inhibition de la synthèse des prostaglandines, nous avons recherché la contribution éventuelle d'un découplage de la phosphorylation oxydative dans ce processus. Dans nos conditions expérimentales, le sulfure de sulindac, mais pas le NS-398, provoquait une chute du potentiel transmembranaire mitochondrial Dγm, et ce, indépendamment de l'expression des COXs. Cet effet découpleur précédait la libération de protéines mitochondriales pro-apoptotiques (cytochrome c, Smac/DIABLO), ainsi que l'activation des caspases 3 ou 9. La préincubation des cellules par la ciclosporine A inhibait la libération deSmac/DIABLO induite par le sulfure de sulindac, suggérant l'intervention du complexe de perméabilisation de pore dans le relarguage de protéines mitochondriales pro-apoptotiques. Le découplage de la phosphorylation oxydative n'était cependant pas suffisant pour expliquer la totalité de l'effet du sulfure de sulindac puisque le FCCP (découpleur de référence) n'induisait pas d'apoptose malgré la chute de Dγm et la libération mitochondriale de facteurs pro-apoptotiques.