Thèse soutenue

Le système latéral du bar, Dicentrarchus labrax, et les conséquences d'un dysfonctionnement sur son comportement : action potentielle des ions métalliques

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Auteur / Autrice : Karine Faucher
Direction : Jean-Paul Lagardère
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Océanologie biologique et environnement marin
Date : Soutenance en 2004
Etablissement(s) : La Rochelle

Résumé

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Le système latéral est un organe sensoriel présent chez les amphibiens aquatiques et les poissons. Il est utilisé par les poissons pour l'identification et la localisation d'obstacles, la détection des objets en mouvement (proies, prédateurs), la détection des vibrations générées par les ondes sonores, la communication intraspécifique (nage en banc, parade sexuelle) et la rhéotaxie. L'intégrité morphologique et fonctionnelle de ce système sensoriel apparaît donc comme un élément indispensable à la présence et à la survie d'un poisson dans un écosystème. Or, de part sa localisation à l'interface entre l'animal et le milieu, et le fait qu'il fonctionne via des flux d'ions, cet organe sensoriel exposé directement et en permanence au milieu ambiant pourrait être la cible d'une pollution d'origine naturelle ou anthropique. Le but de cette étude était d'examiner l'impact d'une pollution métallique (et en particulier, de l'ion cadmium) du milieu sur l'état tissulaire et fonctionnel du système latéral du bar, Dicentrarchus labrax (L. ), puis d'observer les conséquences comportementales induites sur des groupes d'individus évoluant dans des conditions contrôlées de laboratoire. Une étude préliminaire des caractéristiques morphologiques et de la distribution spatiale des deux types de neuromastes composant le système latéral du bar a été réalisée à l'aide de la microscopie électronique à balayage. Comme ce qui a été généralement observé chez les téléostéens, le bar possède deux types de neuromastes (superficiels et canaux) répartis sur la tête, le tronc et la queue. Le gradient décroissant de capacité sensorielle, mis en évidence de l'extrémité rostrale à l'extrémité caudale de la ligne latérale troncale du bar, est très original et pourrait jouer un rôle dans le fonctionnement du système latéral. L'axe de sensibilité majeure des deux types de neuromastes du système latéral troncal a été identifié dans l'axe longitudinal du poisson, ce qui lui octroie une sensibilité accrue aux stimuli appliqués le long de son corps. Afin de révéler les conséquences comportementales liées à un dysfonctionnement du système latéral du bar, les deux types de neuromastes ont été endommagés artificiellement. Pour cela, une double technique spécifique, efficace, reproductible et peu invasive pour le poisson a été mise au point afin de dégrader au maximum ce système sensoriel. Cette méthode alliait la section des nerfs innervant le système latéral et un bain antibiotique. Les résultats obtenus indiquent que l'inactivation du système latéral du poisson entraîne une réduction de son comportement d'exploration verticale de l'habitat. Par contre, l'inactivation de ce système sensoriel n'a pas d'effet sur la prise alimentaire nocturne du poisson lorsque cette prise est constituée de proies inertes, un système de compensation sensorielle s'appuyant sur le système olfactif se met en place très rapidement. Les conséquences comportementales d'une exposition aiguë du bar à l'ion métallique cadmium ont ensuite été examinées. Cette étude a montré que le cadmium à forte concentration dans l'eau de mer (5 µg. L-1) a un effet inhibiteur sur la réponse de fuite des poissons face à un danger. Cet effet comportemental s'accompagne de la destruction des deux types de neuromastes composant le système latéral observé en microscopie électronique à balayage. Après 21 jours, on constate une régénération des tissus des neuromastes, ainsi qu'une restauration du comportement de fuite des poissons. Par contre, lors de l'exposition aiguë au cadmium à la concentration rencontrée en milieu naturel contaminé (0,5 µg. L-1), le comportement de fuite du poisson n'est pas modifié et les tissus des neuromastes demeurent intacts. Cependant, les stimuli appliqués lors de cette étude pour simuler un danger au poisson étant relativement forts, on peut donc se demander si après une exposition aiguë au cadmium à 0,5 µg. L-1, le bar serait toujours capable de détecter le mouvement subreptice d'une proie vivante mobile. Ce travail mériterait d'être poursuivi par des études visant à déterminer la concentration seuil de cadmium responsable de dommages tissulaires au niveau des neuromastes et celle causant des désordres comportementaux. Il serait également intéressant d'examiner l'effet synergique des ions métalliques présents dans le milieu naturel (cadmium, cobalt, cuivre, mercure, nickel, plomb, zinc, etc. . . . ) sur le système latéral du bar et le comportement de cette espèce.