La rhétorique du labyrinthe dans le ''Laberinto de Fortuna'' de Juan de Mena
Auteur / Autrice : | France Calmels Autesserre |
Direction : | Monique De Lope |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Études romanes |
Date : | Soutenance en 2003 |
Etablissement(s) : | Aix-Marseille 1 |
Partenaire(s) de recherche : | Autre partenaire : Université de Provence. Faculté des lettres et sciences humaines (1969-2011) |
Mots clés
Résumé
Long poème allégorico-narratif, de presque trois cents strophes, que l'auteur Juan de Mena, remet en 1444 à son souverain le roi Jean II de Castille (1406-1454) le ''Laberinto de Fortuna'' est l'exemple le plus achevé de la langue poétique cultivée pratiquée en ce haut lieu de la poésie qu'était la cour de Castille. Le propos de l'auteur, exprimé dès la deuxième strophe, semble clair et conforme aux préoccupations de son temps : ''chanter'' l'inconstance de la Fortune qui fait du parcours temporel humain un véritable labyrinthe. Pourtant, très vite, l'auteur diverge de son premier propos. Le blâme contre la Fortune se transforme en une leçon morale et politique adressée à son souverain. La volonté didactique de l'auteur passe au premier plan. Le labyrinthe devient ce chemin initiatique dans lequel le poète tente d'entraîner son souverain et le conduire jusqu'à l'accomplissement de soi dans son devoir de roi. La situation de totale anarchie où se trouve la Castille de la première moitié du XVème siècle, livrée aux guerres intestines pour la conquête du pouvoir, la cupidité du favori du roi, et surtout la personnalité velléitaire de ce dernier, justifient la leçon que le poète, conscient de son rôle de guide, adresse à son souverain : prendre en main les règnes du royaume, faire règner l'ordre et la justice, achever la Reconquête, afin de redonner à l'Espagne l'unité et la gloire qui furent siennes du temps de l'empire des Goths. Mais comment l'auteur peut-il adresser cette leçon au roi, dont dépend son sort en tant que fonctionnaire royal, sans que celui-ci ou son favori en prennent ombrage ? Par un discours détourné, si prisé en cette fin de Moyen Age par le jeu linguistique mettant à profit tous les ressorts de la rhétorique qui font de l'interprétation du poème un autre labyrinthe. C'est ce discours poétique, orienté vers la finalié humaine et politique précédemment définie, que nous avons analysé dans toute sa complexité, aux différents niveaux d'organisation du texte : phonétique, lexicale, sémantique, syntaxique ainsi que rythmique et métrique. Ce discours oblique, servi par une forme éminemment érudite et raffiné, ne pouvait que plaire à un roi fin lettré et susciter chez lui cette adhésion au but que le poète avait conçu pour celui-ci : règner.