Thèse soutenue

Anxiété et risque vasculaire : l'étude EVA, enquête de cohorte d'une population de 1389 sujets de la ville de Nantes âgés de 59-71 ans et suivis pendant 7 ans

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Auteur / Autrice : Sabrina Paterniti
Direction : Annick Alpérovitch
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Santé publique
Date : Soutenance en 2002
Etablissement(s) : Paris 11
Jury : Président / Présidente : Denis Hémon
Examinateurs / Examinatrices : Denis Hémon, Claire Bonithon-Kopp, Silla Consoli, Jean-Pierre Lépine
Rapporteurs / Rapporteuses : Claire Bonithon-Kopp, Silla Consoli

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Dans les dernières années, des études longitudinales de population ont suggéré que l'anxiété était un facteur de risque coronaire, mais les mécanismes qui lient cette émotion négative au risque cardio­ vasculaire sont encore inconnus. Ce travail avait pour objectif général d'étudier le rôle de l'anxiété dans la survenue d'événements coronariens, ainsi que dans le développement de l'athérosclérose, mesurée par l'échographie des artères carotides. Un de nos objectifs était de déterminer si la relation entre anxiété et pathologie vasculaire peut être entièrement expliquée par le lien entre anxiété et hypertension artérielle ou si cette relation fait intervenir d'autres mécanismes. L'étude EVA (Etude sur le Vieillissement Artériel) est une étude longitudinale des conséquences cognitives et vasculaires du vieillissement et de leurs facteurs de risque endogènes et exogènes. Les 1389 participants (574 hommes et 815 femmes âgés de 59 à 71 ans) ont été tirés au sort sur les listes électorales de la ville de Nantes. Les données recueillies concernaient les caractéristiques socio­démographiques, la consommation de tabac et d'alcool, les principaux événements médicaux présents ou passés et la consommation de médicaments. Les pathologies vasculaires et leurs facteurs de risque étaient recherchés par des questions précises. La survenue d'infarctus du myocarde et d'angine de poitrine reportée par les sujets a été confirmée par une commission d'experts sur la base des dossiers médicaux. Les symptômes dépressifs et anxieux étaient mesurés à l'aide de deux questionnaires : la "Center for Epidemiologie Studies-Depression scale" et la "Spielberger Inventory Trait". L'exploration vasculaire des sujets comprenait un examen Doppler et échographique des artères carotides et un Doppler transcranien des artères sylviennes. Les deux premiers examens de suivi, effectués à deux ans et à quatre ans, étaient très semblables au bilan initial. Un examen IRM a été réalisé à quatre ans de suivi. Les examens suivants, annuels, comportaient essentiellement des informations sur la morbidité vasculaire et sur la symptomatologie dépressive. Nous avons d'abord réalisé trois analyses transversales. Dans la première nous avons évalué l'association entre l'anxiété et la pression artérielle (PA) élevée, définie par la présence d'une PA systolique 160 mm Hg ou/et une PA diastolique 90 mmHg, après avoir exclu de la population étudiée les sujets déjà traités par antihypertenseurs. La présence d'une PA élevée était significativement liée à la présence de symptômes anxieux : pour les hommes (OR (95%IC)=3. 6 (1. 4-9. 5)) et pour les femmes (OR(95%IC)=6. 8 (1. 7-26. 6)). Deuxièmement, nous avons trouvé, chez les femmes, que les scores d'anxiété étaient corrélés négativement avec le diamètre et la lumière de l'artère carotide et avec les vitesses sanguines au niveau de l'artère sylvienne. Enfin, les sujets anxieux présentaient des hypersignaux de la substance blanche, de volume plus important que les sujets non anxieux. Cette relation concernait surtout la population féminine (OR(95%IC)=3. 2 (1. 5-6. 9). Les deux analyses longitudinales ont été réalisées chez des sujets sans aucun antécédent de maladie coronarienne. Chez les sujets avec anxiété élevée et stable (dernier décile), l'augmentation de l'épaisseur de la paroi de l'artère carotide pendant le suivi de quatre ans était plus importante que chez les sujets non anxieux (hommes: moyenne ajustée=+0. 08 vs. +0. 04 mm, p=0. 05; femmes : +0. 07 vs. +0. 04, p=0. 07) ; dans la même période, les hommes anxieux montraient aussi un risque plus élevé de survenue de nouvelles plaques carotidiennes que les hommes non anxieux (OR(95%IC)=3. 5(1. 4-8. 5)). Nous avons enfin calculé le risque d 'incidence d'un épisode d'infarctus et d 'angor. Les hommes dont les symptômes anxieux étaient les plus sévères (au-dessus de la médiane) avaient un risque plus important de souffrir d'un événement coronarien (RR(95%IC)=2. 5 (1. 1-5. 5)). Chez les femmes, aucune relation significative entre anxiété et incidence d'événements coronariens n'a pu être décelée. Tous ces résultats étaient indépendants de plusieurs facteurs de confusions possibles, comme l'âge, l'index de masse corporelle, la consommation d'alcool, le tabagisme, l'utilisation de psychotropes, la présence de maladies chroniques, le taux de cholestérol total et de triglycérides et la pression artérielle ; mais également la présence de plaques d'athérosclérose au niveau de l'artère carotide en ce qui concerne la prédiction d'événements coronariens. Ces résultats montrent que l'anxiété constitue un facteur de risque de pathologie cardio-vasculaire. Les associations trouvées entre l'anxiété et une pression artérielle plus élevée et entre anxiété et progression de l'athérosclérose plus rapide n'expliquent pas entièrement les mécanismes qui lient l'anxiété à la survenue d'événements coronariens.