Thèse soutenue

Les indigènes paysans entre maisons de commerce et administration coloniale : pratiques et institutions de crédit au Sénégal (1840-1940)

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Samba Thiam
Direction : Bernard DurandSamba Traoré
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire du droit
Date : Soutenance en 2001
Etablissement(s) : Montpellier 1

Mots clés

FR

Mots clés contrôlés

Résumé

FR

Le développement de la culture de l'arachide au Sénégal est lié à l'implantation des commerçants européens et à l'installation de l'administration coloniale au XIXe siècle. Le monopole du capital détenu par les grandes maisons de commerce, grâce à l'appui financier des banques et au contexte politique de l'époque, a permis à celles-ci de placer les traitants africains, les courtiers étrangers et bien d'autres intermédiaires, à leur service. Ces grandes maisons ont pu ainsi avoir la mainmise sur les revenus de l'arachide. Les échanges entre les produits locaux et les marchandises importées constituent ce qu'on a appelé l'économie de traite. Et la traite de l'arachide a donné lieu à un certain nombre de pratiques usuraires de crédit, en l'occurrence les crédits d'hivernage et les prêts sur gages, face à l'impossible pratique du crédit hypothécaire. Dès la fin du XIXe siècle, l'administration coloniale entreprend sérieusement de combattre l'usure. De la réglementation des pratiques de traite et des prêts sur gages à la tentative, en vain, de mise en place des Monts-de-Piété, on est arrivé à l'organisation en 1910 de sociétés indigènes de prévoyance, de secours et de prêts mutuels agricoles dont l'existence a été complétée par l'introduction du crédit agricole dans les colonies d'Afrique en 1926. Mais bien que symbolisant la première expérience de la mutualité en Afrique occidentale et malgré son caractère bienfaisant qui se manifeste par l'accomplissement d'opérations de prêts en nature (marchandises et semences), de prêts en espèces et de prêts mutuels agricoles, la société indigène de prévoyance n'a pas atteint son objectif du fait de certains abus commis par des chefs indigènes, des agents et de certains administrateurs. Ces abus ont été accomplis sous la tolérance de l'administration coloniale et par l'intervention de certaines autorités pour des considérations d'ordre économique et politique, d'où l'impunité des fautes commises. Finalement les indigènes paysans se trouvent piégés pendant un siècle (1840-1940) entre les pratiques usuraires de crédit des maisons de commerce et les institutions de crédit mises en place par l'administration coloniale. Ces institutions, prévues pour être des systèmes de lutte contre l'usure, se présentent dans la réalité sous le signe d'instruments de stratégie coloniale.