Thèse soutenue

Justice sociale et santé : l’accès aux soins à Abidjan

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Auteur / Autrice : Hélène Perrin
Direction : Jean-Paul Azam
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences économiques
Date : Soutenance en 2001
Etablissement(s) : Clermont-Ferrand 1

Résumé

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La justice sociale est l’une des questions fondamentales de l’économie contemporaine. Elle a suscité, à partir des années soixante-dix, un regain d’intérêt parmi les philosophes et les économistes. Les théories économiques de la justice se sont alors attachées à proposer les conditions permettant d’aboutir à un état de société juste. Elles ont aussi largement inspiré les principes de justice appliqués à des domaines spécifiques de la société. La santé, en particulier, apparaît comme un champ d’application privilégié de ces théories. La question de la justice dans le domaine de la santé se pose avec une intensité particulière dans les pays en voie de développement où l’état sanitaire des populations est faible et où le montant des ressources allouées à la santé et souvent mal utilisé. La problématique développée ici s’inscrit à la croisée des trois grands domaines de l’économie évoquée ci-dessus, à savoir l’analyse de la justice sociale, l’économie de la santé et l’économie du développement. La thèse se propose d’analyser en termes de justice, l’impact de la politique sanitaire menée actuellement dans la majorité des pays d’Afrique de l’Ouest et, en particulier, en Côte d’Ivoire. Cette politique est basée sur les principes de l’Initiative de Bamako, lancée en 1987 par l’OMS, l’UNICEF et les gouvernements des pays d’Afrique de l’Ouest. Elle repose notamment sur deux points : le paiement d’une partie des soins par les usagers et l’amélioration de la qualité. Ces principes suscitent un débat fort animé relatif à la justice d’une telle politique. Pour certains, la justice est garantie car cette réforme sanitaire devrait permettre l’accès aux soins du plus grand nombre. D’autres, en revanche considèrent cette politique injuste dans la mesure où elle risque d’exclure du système de soins les malades les plus pauvres. Cette thèse entend prendre part à ce débat et apporter des éléments de réponse à la question de justice soulevée ici. Elle se déroule en quatre mouvements. Le premier dresse un tableau des principales théories économiques de la justice développées au cours de ce siècle. Il permet de cerner avec précision la notion de justice, fondamentale dans cette recherche. Le second analyse les principes de justice développés dans le domaine plus spécifique de la santé. Il conduit à identifier une méthode empirique nous permettant de détecter une éventuelle injustice de l’impact de la politique sanitaire en vigueur à Abidjan. Cette méthode, reposant sur l’estimation économétrique d’une fonction de demande de soins, utilise les données d’une enquête menée par nos propres soins, à Abidjan, de février à mars 1998, auprès de 4000 ménages. Le troisième mouvement présente les grands traits de ce travail de terrain et analyse, sous l’angle de la justice, les résultats descriptifs issus de cette enquête. Une certaine injustice dans l’accès aux soins est pressentie à l’issue de cette analyse descriptive et confirmée par les résultats économétriques exposés dans le quatrième temps de la thèse. L’impact de la demande du système de l’amélioration de la qualité des soins, supposée compenser l’effet négatif du prix, est susceptible d’accroître essentiellement le recours aux soins des plus riches. Des solutions alternatives, plus favorables aux démunis, sont alors discutées. Différentes politiques de ciblage, destinées à diriger les ressources publiques en priorité vers les plus pauvres, sont, en particulier, analysées. Si certaines peuvent être défendues d’un point de vue théorique, leur mise en œuvre risque de se confronter à des difficultés. Ces propositions doivent donc être affinées et la recherche d’autres solutions permettant d’assurer, de façon plus adaptée encore, l’accès aux soins des plus démunis, doit plus que jamais, être poursuivie.