Thèse soutenue

L'émergence de la figure d'auteur par l'autobiographie : l'exemple de Casanova et de Goldoni

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Auteur / Autrice : Claire Meylan-Kelmanowitz
Direction : Georges Zaragoza
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature comparée
Date : Soutenance en 2000
Etablissement(s) : Dijon
Jury : Examinateurs / Examinatrices : François Lecercle, Sylvain Menant, Sylviane Léoni

Résumé

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Casanova et Goldoni ont ceci de commun qu'ils sont vénitiens et qu'ils ils ont écrit leur vie en français. Le choix d'une langue d'adoption pour se raconter ne va pas de soi. La langue natale traduit en effet de manière plus immédiate et plus intime le premier rapport que l'on a au monde. La langue d'adoption retrace au contraire un processus d'acquisition et de reconstruction de soi. L'écriture en français pose donc un problème d'ordre générique, celui de l'autobiographie, fortement solidaire du contexte historique, national, et européen. L'Europe est alors sous une domination linguistique française qui éclipse les autres langues, et qui place les auteurs étrangers dans une position minoritaire et périphérique. L'autobiographie des vénitiens offre donc un témoignage très intéressant sur un cosmopolitisme mythique prôné par les Lumières, mais qui rejette en réalité d'autres cultures, et tout particulièrement celles de l'Europe méridionale, jugée retardataire et obscurantiste. Des lors, l'écriture autobiographique devient véritablement le lieu d'une revendication à la fois auctoriale et identitaire. Ecrivant en français, les mémorialistes privilégient leur lectorat et la diffusion de leur récit autobiographique à la spontanéité et à l'intimité de la langue maternelle. Ainsi, dépassant le clivage que l'on distingue traditionnellement entre mémoires et autobiographie, Histoire de ma vie de Casanova et les Mémoires de Goldoni offrent une variante originale du récit de soi. En écrivant leur vie, les deux vénitiens en effet visent moins à la "confession" telle que l'entend rousseau, ou au témoignage historique de ceux que l'on appelle stricto sensu les "mémorialistes", qu'au désir de se faire reconnaitre en tant qu'auteurs. Ces deux écrivains en exil voient dans le récit autobiographique l'ultime occasion de s'imposer sur la scène européenne, tendant, selon des stratégies qui leur sont propres, à faire de l'espace autobiographique un lieu de promotion du moi auctorial.