Le temps chez les premiers historiens grecs : Hérodote, Thucydide et Xénophon
Auteur / Autrice : | Emmanuel Golfin |
Direction : | Marie-Christine Leclerc |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Langue et littérature grecques |
Date : | Soutenance en 1999 |
Etablissement(s) : | Toulouse 2 |
Résumé
L'étude du temps chez Hérodote, Thucydide et Xénophon impose un questionnement multiple. La façon dont les historiens résolvent le problème de l'établissement d'une chronologie révèle leur conception d'une suite d'événements dans le flux du temps. Hérodote se distingue par la diversité des modes de datation. Thucydide est le seul à avoir édifié une méthode chronologique en système. Xénophon suit Thucydide sans avoir sa rigueur. L'organisation du récit reflète une structuration du temps, en termes de progrès, de décadence ou de désordre. Chaque auteur en fait un traitement rationnel, souvent optimiste, excepté peut-être Xénophon à la fin des Helléniques. Chroniqueurs de l'histoire récente, Hérodote et Thucydide se penchent aussi sur le passé ancien, esquissant une véritable histoire grecque depuis les origines. Une telle préoccupation disparaît chez Xénophon, pour qui le passé n'est plus qu'une référence utilisée par les orateurs. Il est devenu partie intégrante d'un discours idéologique. Concernant les individus dans le temps, la vision tragique reste la norme, avec l'originalité que représentent les rapports de forces chez Thucydide, qui se substituent au destin voulu par les dieux tout en revêtant à leur tour un caractère de nécessité. D'un point de vue philosophique, le temps est perçu comme un facteur de changements ininterrompus par Hérodote ; Thucydide borne le devenir en lui assignant des lois, qui limitent la part d'inconnu ; Xénophon a certaines difficultés pour penser le changement dans la mesure où pour lui l'histoire est l'enjeu d'un conflit entre idéal et réalité. Cependant la vérité des faits transparaît dans son récit. Même s'il y a un ordre du temps, il ne suit pas forcément un cours cyclique, image d'une perfection dont les historiens savent qu'elle n'est pas de ce monde. Le temps semble s'abolir en tant que force de fragmentation du réel avec la notion de longue durée, qui donne à voir des évolutions lentes, des périodes signifiantes par-delà le morcellement de l'instant. Chez Hérodote l'amplitude de la durée laisse entrevoir une historicité universelle : à l'image des sédiments, le temps est disposé en couches superposées. Nos trois auteurs, enfin, ont l'intuition de l'éternité, une éternité temporelle, ou l'être au lieu du devenir se manifeste dans sa plénitude. Il y a de l'être dans le devenir.