Thèse soutenue

Jean-Baptiste-Antoine Suard, journaliste des Lumières : essai sur la carrière et l'oeuvre d'un critique littéraire de la seconde moitié du XVIIIe siècle

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Auteur / Autrice : Éric Francalanza
Direction : Roger Marchal
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langue et littérature françaises
Date : Soutenance en 1999
Etablissement(s) : Nancy 2

Résumé

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Si l’œuvre de Jean-Baptiste-Antoine Suard (1733-1817) peut encore nous intéresser, c'est qu'elle pose le problème fondamental de l'auteur et de la création critique au XVIIIe siècle. Ses premiers journaux, notamment, le journal étranger (1760-1762) et la gazette littéraire de l'Europe (1764-1766), sont le fruit d'une collaboration de toute l'Europe savante. De fait, la situation du journaliste qu'est Suard se révèle difficile à décrire. Elle peut être regardée comme le résultat de ce compromis, idéologique et économique, entre le pouvoir et les philosophes, qui caractérise cette seconde moitié du XVIIIe siècle. Mais cette ambiguïté tient aussi au statut même de l'homme de lettres, a fortiori du journaliste, qu'on ne saurait définir seulement, comme aujourd'hui, par le rapport de l'écrivain et de son texte. Les journaux de Suard forment une mosaïque d’œuvres dont les auteurs ne sont ni identifiés ni toujours identifiables. Force est alors de se livrer à une étude des conditions et des circonstances qui président à l'écriture de ces textes. Elles relèvent de deux ordres. L'un tient aux milieux littéraires qui servent la carrière de Suard, confirment ses goûts et le font entrer, en1774, à l’Académie Française. L'autre touche à la politique du livre - police de la librairie, ministère des affaires étrangères, censure - : la compréhension des règles complexes et diffuses qui gouvernent le monde du livre est essentielle pour qui cherche à vivre de sa plume. Suard écrira des pages remarquables sur l’idée de liberté, qui traduisent en même temps une confiance dans le système de la censure, jugée en théorie nécessaire, et un scepticisme : il doute fort de son efficacité. Reste que la réussite de Suard se mesure surtout dans son œuvre critique. Sa poétique, pourtant encore très attachée aux principes classiques, réserve une place honorable aux oeuvres d'inspiration nouvelle : son cosmopolitisme lui permet d'en appréhender la richesse avec une grande lucidité. D'autre part, son génie trouve toute son expression dans la maîtrise de l'article, forme, sinon genre, d'une modernité à la fois philosophique et littéraire. Or ce sont précisément cette intelligence de l'existence matérielle du texte, cette profondeur de l'écriture critique et cette maîtrise de l'article, qui donnent à l’œuvre de Suard sa portée littéraire, en un mot sa richesse.