La problématique des rapports entre l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel dans l'Islam et dans le christianisme
Auteur / Autrice : | Mezri Haddad |
Direction : | Claude Polin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie |
Date : | Soutenance en 1997 |
Etablissement(s) : | Paris 4 |
Résumé
Il a été souvent dit que, contrairement au christianisme, dans l'Islam, l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel sont indissociablement liés. En considérant d'abord les "vérités" scriptuaires (bible-coran), nous avons démontré la fragilité théologique et philosophique de cet énoncé essentiellement sociologique et politique. Une longue restauration conceptuelle, la prise en compte de quelques données historiques relatant la genèse et l'évolution du couple religion/politique dans les deux monothéismes, viennent corroborer notre hypothèse centrale: même si, à la différence de Jésus, Mouhammad a été à la fois guide spirituel et chef politique, il n'y a pas à proprement parler de séparation bien hermétique entre temporel et spirituel, "auctoritas" et "potestas", dans les deux religions. Prétendre le contraire, c'est admettre comme prémisse philosophique le dogme laïc de la pensée moderne. Le "rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu" n'implique point la séparation mais juste la distinction entre les deux instances. Etablir une étroite corrélation entre le "rendez à César" et la séparation tardive de l'Église et de l'État (1905) est, par conséquent, un procédé abusivement simplificateur et concordiste. En réalité, parce que les deux religions se ressourcent dans le judaïsme, elles instaurent une dualité entre l'ici-bas et l'au-delà, entre terrestre et céleste. C'est l'articulation de cette dualité théologique et métaphysique qui commande tout le reste: religieux-politique, temporel-spirituel, foi-loi, sacré-profane. . . Sans minimiser les différences théologiques, métaphysiques, philosophiques et historiques qui existent assurément entre les deux traditions, il nous semble que le christianisme et l'islam ne recommandent ni la rupture radicale entre l'autorité spirituelle et le pouvoir temporel, ni l'absorption de l'un par l'autre selon nous, les deux authentiques traditions établissent l'autonomie des deux domaines tout en les invitant à la cohabitation harmonique.