Thèse soutenue

Giono : par-dela le bien et le mal : analyse de l’ethique, du bouleversement des valeurs dans les chroniques

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Auteur / Autrice : Anne-Marie Boisgontier
Direction : Alain Goulet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature française
Date : Soutenance en 1997
Etablissement(s) : Caen

Résumé

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Giono a lu Nietzsche et a pris acte de la ''mort de Dieu''. Si Dieu est parfois l'objet de discours, ce sont des représentations humaines que Giono met en scène, de manière ironique et fallacieuse. Or, cette absence de Dieu ne conduit pas a une ''intériorisation de Dieu'', c'est-à-dire à l'institution d'une morale humaine. Les protagonistes criminels semblent dénués de scrupules, de remords. La cruauté, la volonté de puissance semblent être les seuls ressorts de l'activité humaine. Ces univers paraissent situés en deçà du bien et du mal. Mais Giono, après la guerre, ne fait pas le seul constat négatif d'une humanité proche de l'animalité. Il suspend le jugement du lecteur : certains procédés et commentaires narratifs, le bonheur, notion gionienne essentielle, que quêtent ces personnages, leur lucidité sur le jeu social favorisent l'époché. Le lecteur est aussi amené àa celle-ci par la manière nietzscheenne dont Giono réévalue les valeurs dans leurs fondements et leurs effets. Le dualisme est mis a mal. Le bien et le mal sont étroitement liés. D'autre part, évinçant dans certains récits le jugement moral, il privilégie le plan esthétique et crée de nouvelles ''fleurs du mal''. Ce primat de l'esthétique montre que les chroniques ne sont pas en deçà du bien et du mal. Ceci est corroboré par le fait que les protagonistes possèdent un code de conduite individuel, une éthique aristocratique qui s'érige contre la médiocrité, notion repoussoir essentielle chez Nietzsche et chez Giono. Lla solitude, le refuge dans l'imaginaire, le plaisir de railler les codes sociaux établis, qui les rapprochent de Giono, fondent leur qualité. Ils s'opposent au ''dernier homme'', l'homme du ressentiment qui craint la vie, se satisfait du confort. Lles protagonistes affirment la vie, veulent en faire un ''phénomène esthétique''. Importent à leurs yeux la réalisation de l'individu, le désir d'intensifier la vie, le plaisir du risque, de l'extrème, le désir de jouer avec les frontières de la mort.