Vision du monde et corporéité : ou danse et corps dansant
Auteur / Autrice : | Yvonne Tenenbaum |
Direction : | Geneviève Clancy |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Art et archéologie |
Date : | Soutenance en 1996 |
Etablissement(s) : | Paris 1 |
Résumé
''La danse'', vieux rêe des humains, existe à travers les différents styles qui la signifient dans chaque culture. Mais ils ne le peuvent que parce qu'ils forment le cadre symbolique où est pourtant parfois créée cette pure présence, singulière et impersonnelle, qui distingue une vraie danse d'une danse simplement belle ou bien exécutée. Nous la nommons ''corps dansant'' : ''corps'' car celui du danseur devient ici si réel qu'il fait oublier tout sens ; ''dansant'' car c'est l'acte de danser qui rend possible cette métamorphose d'un sujet humain. Mais : 1. Comment le ''corps dansant'' est-il construit sur scène, dans le cadre, contradictoire avec son essence, du dispositif de spectacle occidental ? 2. Quel changement de registre permet à un être humain de devenir pure présence, être la échappant au rêgne de la signification ? L'analyse des solos de Carlotta Ikeda (Buto) en montre la condition fondamentale : l'effacement du ''je'' qui se soumet au désir de danser. C'est en effet un désir fondamental en l'homme qui cherche ainsi, en se retirant des mots, à surmonter la division de son être à laquelle le condamne le langage, à résoudre l'énigme que son corps mortel, cet autre en lui, oppose a son ''je''. Une telle présence est possible grâce à la continuité qu'instaure le danser et au processus d'abstraction qu'opère le dispositif (au minimum un lieu reservé, une technique, un public). Celui-ci est investi d'une double fonction, ses modalités exprimant aussi le traitement de ce désir par les pouvoirs sociaux. Or le désir de danser est dangereux, menaçant leur contrôle sur les individus. La danse est ainsi le terrain d'un combat permanent et inévitable entre les institutions qui doivent permettre la manifestation du désir de danser tout en la contrôlant et, malgré cela, l'irruption récurrente du corps dansant - l'histoire de la danse au XXe siècle est exemplaire à cet égard.