Thèse soutenue

Filiations tragiques : recherches autour de quelques figures de la filiation et de la philía familiale dans la tragédie grecque du Ve siècle, chez Eschyle, Sophocle et Euripide

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Auteur / Autrice : Jean Alaux
Direction : Nicole Loraux
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance en 1993
Etablissement(s) : Paris, EHESS

Résumé

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Après avoir défini un protocole de lecture inspiré des travaux de l'anthropologie du monde grec ancien, l’étude se développe sur deux plans. Dans un premier temps, on s'est attaché à l'examen des configurations spécifiques du rapport de filiation chez les tragiques : d'abord à travers les fils d'Oedipe, dont la gémellité suicidaire incarne sur le mode répétitif la dualité paternelle ; à travers Oreste ensuite, qui, toujours chez Eschyle et Euripide, se donne à voir comme un fils mimétique, voué à une dépossession de soi qu'accentue son rapport à Clytemnestre et à Electre ; enfin, à travers l'Hippolyte d'Euripide et l'Hyllos des Trachiniennes, fils paralysés qui se voient interdit, chacun selon son drame propre, l'accès harmonieux à l'âge adulte. Le deuxième axe du travail examine le processus d'"empiègement" qui semble caractériser le rapport à leur parole de ces différents personnages; la polysémie des termes apparentes à philos a servi d'exemple, et permis de rapprocher des figures de fils certains personnages féminins liés à leur histoire et leurs : occasion de revenir, dans un premier chapitre, sur les tragédies d'Oreste, et d'y montrer comment cette polysémie conflictuelle révèle, d'Eschyle a Euripide, les tensions entre liens familiaux et électifs. Dans un deuxième chapitre, c'est Antigone qui incarne, jusque dans Oedipe à Colone, la tendance labdacide à faire retour à l'origine au rebours de la loi de reproduction propre à la vie civique. Enfin, un troisième chapitre est consacré à Médée qui ne semble pouvoir s'"accomplir" qu'en consommant dans le meurtre de ses fils son refus du mariage et sa nostalgie de la maison paternelle. La conclusion propose de voir dans la philia tragique une manière d'antidote à la "bonne" filiation-reproduction civique, et pose la question de l'effet produit sur le citoyen-spectateur d'Athènes par cette mise à distance des évidences fondatrices de sa condition.