L'opéra ou l'illusion de l'apparence : essai d'approche politique
Auteur / Autrice : | Françoise Roques |
Direction : | Jean-Arnaud Mazères |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Science politique |
Date : | Soutenance en 1986 |
Etablissement(s) : | Toulouse 1 |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Au XXe siècle finissant, l'opéra suscite enthousiasme et fascination de la part du public mélomane. Art total, l'opéra semble tisser des liens étroits avec le monde environnant, liens qu'il convient de décrypter. Cependant, il faut se garder de tout discours schématique tant l'opéra est la représentation de l'apparence. Le politique semble être inscrit originellement dans la forme, par le chant qui véhicule l'indifférenciation retrouvée. Plus que toute autre forme artistique, l'opéra est la transgression des normes, des servitudes, et peut ainsi éviter par l'assimilation des différences le vertige de la désillusion. Derrière l'apparence de la représentation, le lieu, la forme, le paraitre social du groupe, un monde occulte qui se doit d'être décrypté. Les formes opératiques permettent au signifiant d'émerger du signifié. Les lieux ont été conçus à l'image de l’Elite, la forme est liée aux commandes du mécénat, la voix se plie aux techniques codifiées. Cependant, les compositeurs d'opéras savent se libérer du carcan des interdits normatifs. Le XXe siècle reste figé dans le répertoire du passé, la création contemporaine opératique étant quasi inexistante. Paradoxe, l'opéra, art de communication, est aujourd'hui coupé de son public, le frustrant ainsi du chant du plaisir, du chant fantasmatique, du limon mythique de ses fondations. Les livrets d'opéra permettent de décrypter le discours de la société dominante, d'en cerner les codes implacables et destructeurs, de saisir le regard du compositeur sur cette société. Les héroïnes d'opéras sont toutes vouées au rôle de victimes, de sacrifiées, de suicidées. L'ordre moral du XIXe siècle est mis en représentation, dénoncé par des compositeurs qui, tel Verdi, refusent l'étouffante hypocrisie de l'idéologie familiale bourgeoise. Didon, Norma, Butterfly sont "suicidées" ; Carmen, Turandot se rebellent. L'opéra est également la reproduction de la fondation et de la violence de l'Etat qui s'édifie, se consolide, au niveau social, sur l'absence de la mère ; au niveau politique, sur l'absence du pouvoir qui s'incarne dans un représentant sacré. Le politique se fonde sur le désir et le manque du groupe.