Contribution à une description de la cause en ancien français
Auteur / Autrice : | Annie Delbey |
Direction : | Claude Thomasset |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Linguistique |
Date : | Soutenance en 1986 |
Etablissement(s) : | Paris 4 |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Les marques grammaticales de la cause en ancien français laissent apparaitre une permanence syntaxique et sémantique alliée à une diversification historique et stylistique. De grandes oppositions demeurent stables aux XIIe et XIIIe siècles : spécialisation de de dans le domaine du sentiment et plus large extension de por; prédominance de por ce que, presque exclusivement utilisé pour justifier l'énoncé, dans le récit, de car, que, puis que, quant, susceptibles de justifier l'énonciation aussi bien que l'énoncé, dans la parole; valeur constamment argumentative de puis que qui, jouant sur la polyphonie de l'énonciation, inscrit dans la langue la volonté de convaincre tandis que por ce que, excepte des effets contextuels, apporte une information nouvelle et objective. Or ces oppositions de sens et d'emploi entre conjonctions correspondent à des statuts syntaxiques différents : seul por ce que est un opérateur qui lie fortement les énonces; les autres mots sont plutôt des marqueurs d'acte de parole. La cause, révélatrice des rapports de force entre interlocuteurs apparait ainsi comme un lieu d'observation privilégié pour la pragmatique. Toutefois on ne saurait étudier avec exactitude la cause en ancien français mais bien plutôt dans la littérature médiévale. La faible proportion de por ce que met en évidence la prédominance de la preuve sur le motif: dans une littérature orale et porteuse de vérité, c'est la parole que justifie la parole. Cependant les permanences syntaxiques ne doivent pas dissimuler les variations de fréquence liées autant aux enjeux littéraires qu'à la diachronie. La prose, au XIIIe siècle, marque un tournant: les conjonctions manifestent la restriction de la parole et assurent la cohésion que donnait la versification; dans la prose historique, avec l'expansion de l'opérateur on ne dit plus seulement le vrai, on décrit le réel.