Thèse en cours

Essais sur l'économie politique des inégalités mondiales

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Auteur / Autrice : Amory Gethin
Direction : Thomas Piketty
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Analyse et politique économiques
Date : Inscription en doctorat le 17/09/2020
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Économie (Paris)

Résumé

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Cette thèse consiste en un ensemble de neuf essais portant sur divers thématiques liées à la pauvreté, aux inégalités et aux clivages politiques. Le premier chapitre étudie le rôle de l'éducation dans la réduction de la pauvreté mondiale et des inégalités de genre depuis 1980. À partir d'enquêtes couvrant 95 % de la population mondiale et d'un modèle reliant éducation et structure des salaires, nous y estimons que l'expansion éducative explique environ la moitié de la croissance mondiale, deux-tiers de la croissance des revenus des 20 % les plus pauvres et plus de la moitié de l'amélioration des inégalités hommes-femmes. Les politiques éducatives apparaissent ainsi au cœur du remarquable déclin de la pauvreté et des inégalités de genre des dernières décennies. Le deuxième chapitre analyse une nouvelle base de données sur les transferts publics en nature reçus dans le monde depuis 1980. La consommation de biens publics explique environ 20 % de la réduction de la pauvreté mondiale. La redistribution gouvernementale dans son ensemble, incluant transferts monétaires et en nature, en explique près de 30 %. Le troisième chapitre construit de nouvelles mesures de la redistribution gouvernementale dans 151 pays depuis 1980. Les transferts expliquent l'essentiel des différences de redistribution entre pays ; les impôts n'ont qu'un effet mineur sur les inégalités. Si la redistribution s’est améliorée, elle n'explique que 20 % des différences de niveaux d'inégalités, tandis que les inégalités primaires en expliquent 80 %. Dans le quatrième chapitre, nous constituons de nouvelles séries sur les inégalités de revenus dans 26 pays européens depuis 1980. Les inégalités s’y sont accrues, mais bien moins qu'aux États-Unis. Elles sont aujourd'hui plus élevées aux États-Unis non pas du fait de différences en termes de redistribution, mais avant tout du fait d'écarts en termes d'inégalités primaires entre les deux régions. Le cinquième chapitre étudie l’accès aux biens publics en Afrique du Sud depuis 1993. Comptabiliser la consommation de services publics augmente fortement les mesures de croissance du revenu des ménages les plus pauvres. Les biens publics apparaissent ainsi comme un levier fondamental d'une croissance plus inclusive. Le sixième chapitre analyse plus en détail les inégalités de revenus en Afrique du Sud. Les inégalités primaires se sont accrues, mais cette croissance a été plus que compensée par une expansion majeure de l'État social. Le pays reste néanmoins parmi les pays les plus inégalitaires au monde, l'appartenance raciale jouant un rôle persistant dans la structuration de ces disparités. Le septième chapitre se tourne vers l’étude des inégalités de patrimoine. Nos résultats révèlent que les 10 % de sud-africains les plus aisés détiennent 86 % du patrimoine, tandis que le patrimoine moyen des 50 % les moins aisés est négatif (leurs dettes excèdent leurs actifs). Rien n'indique que ces inégalités extrêmes aient baissé depuis 1993. Le huitième chapitre examine l'évolution des inégalités de revenus en Afrique, corrigeant les mesures existantes pour les rendre comparables avec celles des autres régions du monde. Les inégalités en Afrique sont élevées et stables depuis 1990. Colonisation de peuplement et diffusion de l'islam apparaissent significativement associées aux niveaux d’inégalités observés. Le neuvième chapitre exploite une nouvelle base de données sur le vote dans 21 pays occidentaux entre 1948 et 2020. Dans les années 1950, les partis sociaux-démocrates et affiliés obtenaient de meilleurs scores parmi les électeurs les moins aisés et les moins diplômés. Si l'association entre revenu et vote est restée stable, le clivage éducatif s'est complètement renversé, les électeurs les plus diplômés votant ainsi davantage ''à gauche'' en 2020. L'analyse de données sur les programmes politiques suggère que cette transformation a été liée à la prise d'importance d'une nouvelle dimension ''socioculturelle'' du conflit politique.