Thèse en cours

Cybersexualité compulsive et consentement : de l'accès précoce et massif à la cybersexualité aux relations sexuelles coercitives ?

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Auteur / Autrice : Farah Ben brahim
Direction : Robert CourtoisYasser Khazaal
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Psychologie
Date : Inscription en doctorat le 26/11/2019
Etablissement(s) : Tours en cotutelle avec Université de Lausanne
Ecole(s) doctorale(s) : Humanités et Langues - H&L
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Qualité de vie et Santé psychologique (Tours)

Résumé

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En France, l'âge moyen d'accès à la pornographie est d'environ 14 ans ½ quel que soit le genre (IFOP, 2017), avec parfois des accès précoces dès l'âge de 9 à 10 ans. Près d'un tiers des jeunes de 14 à 17 ans ont accès plusieurs fois par semaine à la pornographie en ligne. Près de 50% d'entre eux tentent de reproduire des scènes qu'ils ont vues où les hommes sont réduits à leur performance sexuelle et exercent fréquemment des formes de violences à l'égard de leur partenaire. Ce phénomène de consommation de cyberpornographie s'accentue fortement et il contribue à « formater » la sexualité de ces futurs adultes (Aboujaoude, 2011; Jacquemin Le Vern, 2004). La cybersexualité inclut toutes les activités sexuelles observables et pratiquées sur Internet (Adams, Oye & Parker, 2003): visionnage érotique, consommation de pornographie, accès au sexe via les webcams, chats sexuels et jeux sexuels en ligne etc. (Wéry, Karila, Sutter & Billieux, 2014). La forme pathologique de la cybersexualité est présentée sous le nom de cybersexualité compulsive. Elle s'approche du concept d'addiction sexuelle comme elle se caractérise par la répétition de l'usage et la difficulté ou l'absence de contrôle comportemental. Elle touche de plus en plus de personnes : 8% des usagers de la cybersexualité en présentent une utilisation compulsive (Cooper, Delmonico & Burg, 2000). La cybersexualité compulsive est associée à des troubles psychopathologiques qui la favorisent, mais qu'elle peut aussi renforcer à son tour comme des troubles de l'humeur, des troubles anxieux, des difficultés relationnelles et d'intimité (Philaretou, Mahfouz & Allen, 2005), des comportements sexuels à risque etc. (Peter & Valkenburg, 2008). Cependant, l'étiologie de la cybersexualité compulsive reste encore mal déterminée, probablement en lien avec des stratégies dysfonctionnelles d'adaptation. Elle est plurifactorielle et pourrait concerner des traits de personnalité spécifiques comme des traits sexuels compulsifs (Cordonnier, 2006), des motivations de coping (Ben Brahim, Rothen, Bianchi-Demicheli, Courtois & Khazaal, 2019), ou des difficultés d'autorégulation (Rochat, Bianchi-Demicheli, Aboujaoude & Khazaal, 2019). Mais aussi des formes de recherche de régulation du stress (Cooper, Delmonico, Griffin-Shelley & Mathy, 2004), d'une humeur dépressive et d'un attachement évitant (Varfi et al., 2019), etc. Cette cybersexualité compulsive est aussi associée à des antécédents d'expériences aversives comme les violences physiques et sexuelles (Barrault, Hegbe, Bertsch & Courtois, 2016; Southern, 2008). Les antécédents de violences sexuelles subies peuvent favoriser la possibilité de reproduction de violences à l'égard d'un partenaire (Widom & Ames, 1994), mais aussi le risque plus élevé d'y être à nouveau exposé, associant généralement des conduites sexuelles inappropriées (Friedrich, Davies, Feher & Wright, 2006) et à risque (Houck, Nugent, Lescano, Peters & Brown, 2010; Lalor & McElvaney, 2010), une sexualité plus précoce (Pellerin, St-Yves &Guay, 2003), parfois des conduites transgressives, notamment le recours à des substances illicites. Les relations avec manipulations sexuelles coercitives se définissent par le recours à des stratégies qui visent à obtenir d'une autre personne un engagement dans une relation sexuelle malgré son refus initial ou l'absence de son consentement libre et éclairé : séduction insistante, manipulations verbales et psychologiques, menaces physiques, recours à la force (rare), recours à des substances psychoactives notamment en contexte de soirées « festives » (Abbey, 2002; Forbes & Adams-Curtis, 2001). Environ 30% des étudiant.e.s déclarent avoir subi des relations sexuelles coercitives durant leurs études (Struckman‐Johnson, Struckman‐Johnson & Anderson, 2003; White & Smith, 2004) et 15 à 35% reconnaissent avoir exercé déjà ce type de pression (e.g., Finley &Corty, s. d.; Struckman‐Johnson et al., 2003; White & Smith, 2004). La plupart des situations de coercitions sexuelles ne sont pas légiférées et il existerait un continuum entre la population générale et celles des auteurs d'infractions à caractère sexuelle détenus ou non. Les facteurs généralement associés aux relations coercitives sont des traits de domination sexuelle voire du sadisme dans les cas extrêmes, d'hypersexualité (Knight & Sims-Knight, 2011; Russel & Oswald, 2001) et de compulsion sexuelle (Knight, 2010; Knight & Sims-Knight, 2006), d'antécédent de victimisation sexuelle pendant l'enfance, de harcèlement sexuel à l'âge adulte, ainsi que des problèmes de régulations émotionnelles (Schatzel-Murphy, 2011). Les comportements de coercitions sexuelles sont fréquemment en lien avec une adhésion au mythe du viol, à une hostilité envers les femmes qui peut être associée à une légitimation de la violence envers celles-ci (Oddone-Paolucci, Genius & Violato, 2000; Porter & Bent, 2014). Objectifs : Il s'agit d'éclairer les relations entre la cybersexualité compulsive et les relations sexuelles coercitives, à travers les facteurs qui ont contribué à la mise en place d'une cybersexualité problématique et les déterminants qui vont réguler la relation à l'autre, en population générale et auprès d'auteurs d'infractions à caractère sexuelle. Nous prévoyons un format de thèse par articles.