Thèse soutenue

Dynamique transitoire des prairies alpines - relier la biodiversité et les fonctions des écosystèmes dans un monde qui se réchauffe

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Auteur / Autrice : Billur Bektaş
Direction : Wilfried ThuillerTamara Munkemuller
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biodiversité écologie environnement
Date : Soutenance le 05/12/2022
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale chimie et science du vivant (Grenoble ; 199.-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d'écologie alpine (Grenoble)
Jury : Président / Présidente : Jean-Christophe Clément
Examinateurs / Examinatrices : François Julien Munoz, Sabine Rumpf
Rapporteurs / Rapporteuses : Catherine Roumet, Cyrille Violle

Résumé

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Le réchauffement climatique menace la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes. Le règne des plantes constitue non seulement près de 20% de la biodiversité terrestre connue, mais il est également le moteur des écosystèmes en tant que producteur primaire. Les changements induits par le réchauffement chez les plantes ont des implications à des échelles aussi grandes que les écosystèmes. Des individus aux espèces, des communautés aux écosystèmes, l'acclimatation au réchauffement à une échelle se répercute en cascade sur les autres. Cependant, les réponses peuvent ne pas être simultanées, les effets en cascade peuvent ne pas être linéaires, et peuvent inclure une rétroaction entre les échelles. Il est donc difficile de prévoir la biodiversité végétale et le fonctionnement futurs. Pour comprendre l'ampleur, la forme et le chronologie de ces réponses multi-échelles, nous devons démêler les trajectoires d'acclimatation à différentes échelles des plantes. Il s'agit d'un défi important, en particulier dans les écosystèmes où le réchauffement est attendu au-dessus de la moyenne mondiale, comme dans les Alpes européennes.Dans ma thèse, je relève ce défi surtout pour les communautés de prairies de montagne qui sont des points chauds de la biodiversité et fournissent des services écosystémiques essentiels. En montagne, le long de gradients abiotiques, le fort réchauffement entraîne déjà le déplacement de certaines plantes vers des habitats plus frais. Les plantes alpines adaptées au froid doivent donc s'acclimater à de nouvelles niches abiotiques et biotiques. J'ai étudié les réponses multi-échelles de ces plantes en simulant le réchauffement futur avec une transplantation des communautés entières à des altitudes plus basses dans les Alpes françaises.Premièrement, je me suis concentrée sur la phénologie et les performances démographiques au niveau de la communauté et de l'espèce. Après trois ans de l’expérience, alors que les espèces de graminées ont pu compléter leur acclimatation, les plantes à fleurs ont une performance diminuée pour la production de fleurs. Donc, les plantes réchauffées étaient moins attractives pour une diversité de pollinisateurs que les plantes témoins adaptées au réchauffement. Bien que les communautés réchauffées aient acclimaté leur cycle de verdissement et augmenté leur productivité, elles sont restées moins performantes que les communautés témoins. Deuxièmement, j'ai identifié huit espèces perdantes et cinq espèces gagnantes après cinq ans de l’expérience et j'ai montré que les espèces alpines les plus fréquentes ont le plus souffert, comme Poa alpina et Trifolium alpinum. Les perdantes étaient adaptées au froid, courtes, et avaient des feuilles conservatrices. Troisièmement, j'ai développé un nouveau cadre d'assemblage des communautés spatialement explicite pour étudier l’effet du réchauffement sur les règles d'assemblage des communautés et les structures d'abondance des espèces. J'ai montré que sous un réchauffement expérimental, l'importance des filtres abiotiques par rapport aux filtres biotiques dans l'assemblage de la communauté a changé. Finalement, j’ai étudié le fonctionnement des communautés végétales et les liens avec le sol. J'ai constaté que les communautés réchauffées sont devenues plus conservatrices et collaboratrices avec leurs associés champignons pour l'acquisition de ressources. Ces changements ont modifié les fonctions de l'écosystème telles que la productivité souterraine et la décomposition.Ma thèse met en évidence la variabilité du chronologie et des formes fonctionnelles des réponses au changement climatique à différentes échelles. Elle montre également que même certaines réponses rapides et fortes au réchauffement laissent des délais d'acclimatation. J'ai également fourni des développements conceptuels pour le suivi des trajectoires d'acclimatation à multi-échelles qui peuvent servir d'exemple pour de futures études en écologie expérimentale du réchauffement.