Philippe Jaccottet, la poésie et le doute
Auteur / Autrice : | Madeleine Brossier |
Direction : | Jérôme Thélot |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Lettres mention langue et littérature françaises |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2018 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Lettres, Langues, Linguistique et arts (Lyon) |
Mots clés
Résumé
Ce travail de thèse est né d’un étonnement devant les inflexions contraires que revêt le doute dans l’œuvre de Philippe Jaccottet. Comme l’aile de l’oiseau qui retient son attention, tour à tour lumineuse et sombre dans le battement du vol, l’incertitude est à la fois l’élan du poète et la condition d’une modernité privée de repères. La première partie de notre thèse s’attache à souligner comment l’incertitude apparaît, chez Jaccottet, comme un être-au-monde qui détermine à la fois une éthique et une poétique. Il s’agit de montrer que si cette incertitude a ses racines dans la violence de l’histoire, elle renoue avec la suspension sceptique qu’elle renouvelle, et se nourrit de la méfiance romantique à l’encontre de la rationalité. Une deuxième partie explore néanmoins comment cette incertitude se retourne parfois contre-elle-même, dans un dialogue avec une voix négatrice, aux accents nihilistes. L’un des apports de notre travail est de mettre au jour l’importance de Dostoïevski dans l’affrontement de la voix du doute, notamment dans le seul récit en prose de Jaccottet, L’Obscurité, qui donne à entendre une nouvelle voix du « sous-sol ». Le doute ne conduit-il pas alors à la paralysie ? Les tâtonnements se transforment en vains piétinements, le dos du poète se voûte sous le poids de l’accumulation mélancolique des raisons de douter de tous les idéaux déchus, y compris de celui de la poésie. La confiance renouvelée par Jaccottet dans l’écriture et plus précisément dans la poésie, confiance qui se manifeste jusque dans ses derniers ouvrages, parus à titre posthume, est nourrie par l’exploration la plus intransigeante des raisons d’en douter, et c’est en cela que son œuvre nous requiert. Une troisième partie, à la lumière de la phénoménologie de la donation, propose de fonder cette confiance retrouvée, que Jaccottet nomme fidélité, sur l’expérience de moments poétiques inattendus reçus comme des dons, qui reconduisent une interrogation sur le nœud mystérieux entre l’immanence et la transcendance. Parce que la donation de l’instant poétique implique de quitter le paradigme rationaliste de la connaissance acquise ou du dogme religieux, elle sauve du doute. Se pose alors une dernière question, celle du mystère de la donation du poème.