Thèse soutenue

Variabilité morphologique des chiens et renards roux dans les premières sociétés agricoles d'Europe : approche morpho-fonctionnelle basée sur la mandibule

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Auteur / Autrice : Colline Brassard
Direction : Anthony HerrelStéphanie BréhardRaphaël CornetteCécile Callou
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anatomie fonctionnelle
Date : Soutenance le 03/12/2020
Etablissement(s) : Paris, Muséum national d'histoire naturelle
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Mécanismes adaptatifs et évolution (Brunoy (Essonne)) - Archéozoologie, archéobotanique : sociétés, pratiques et environnements (Paris)
Jury : Président / Présidente : Rose-Marie Arbogast
Examinateurs / Examinatrices : Anthony Herrel, Stéphanie Bréhard, Rose-Marie Arbogast, László Bartosiewicz, Adam Hartstone-Rose, Allowen Evin, Claude Guintard
Rapporteurs / Rapporteuses : László Bartosiewicz, Adam Hartstone-Rose

Résumé

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Les changements culturels et techno-économiques majeurs survenus en Europe entre 7000 et 4000 ans avant J.-C., notamment le développement de l'agriculture, ont eu d’importantes répercussions sur les animaux qui vivaient près des hommes. Le chien, seul animal domestiqué depuis déjà plusieurs millénaires, est probablement un bon marqueur de l'évolution des sociétés humaines à cette époque. Bien que de nombreuses données nous informent sur son statut et sa diversité génétique, très peu d'études ont documenté sa variabilité morphologique et les éventuelles adaptations fonctionnelles en découlant, en lien avec les contraintes anthropiques. En outre, à ce jour, aucune étude n'a exploré la variabilité des renards roux anciens, bien qu'ils soient susceptibles de développer les mêmes adaptationsque les chiens (mais dans une moindre mesure en raison de leur nature commensale). Dans cette thèse, une approche morpho-fonctionnelle innovante est utilisée pour décrire l'évolution de la mandibule (l'os le mieux préservé dans les séries archéologiques et un élément fonctionnel important de l'appareil masticateur) du Mésolithique au tout début de l'âge du Bronze en Europe occidentale et au sud de la Roumanie. La photogrammétrie et la morphométrie géométrique sont utilisées pour quantifier la forme des os en 3D. Dans un premier temps, les facteurs de forme et les relations forme-fonction au sein de l'appareil masticateur sont explorés dans un échantillon de chiens et de renards modernes. Les muscles masticateurs d'environ 120 chiens de différentes races et de renards ont été disséqués. Un modèle biomécanique d'estimation de la force de morsure à partir des données musculaires est établi et validé par des mesures in vivo. De fortes interrelations entre le crâne, la mandibule,les muscles masticateurs et la force de morsure sont démontrées pour les deux espèces, soulignant la forte intégration malgré les sélections artificielles extrêmes chez les chiens modernes. Un modèle prédictif de la force de morsure utilisant la forme des fragments mandibulaires est donc développé pour interpréter les variations de forme dans l'échantillon archéologique. Les impacts des facteurs de développement et environnementaux (climat, urbanisme, alimentation) sur la forme ou la fonction sont quantifiés par l'étude de 433 renards australiens. Ensuite, la variabilité des chiens et des renards anciens (528 chiens et 50 renards)est comparée à celle des canidés modernes (70 chiens, 8 dingos, 8 loups, 68 renards). De fortes différences morphologiques sont démontrées pour les deux espèces, ce qui suggère des différences fonctionnelles. Les chiens anciens semblent très variables en termes de taille et de forme, bien que moins variables que les chiens modernes. Les hypertypes récents n'ont pas d'équivalent dans notre échantillon archéologique. Plus surprenant, certaines formes anciennes ne sont pas trouvées dans l'échantillon moderne. Enfin, la variabilité existant chez les chiens avant l'âge du Bronze est explorée et mise en relation avec les informations déjàdisponibles. De fortes différences entre l'Europe de l'Est et de l'Ouest sont mises en évidence, reflétant les histoires très différentes des populations canines dans ces deux régions. Dans chaque zone géographique, des différences temporelles mais aussi culturelles dans la taille et la forme des chiens sont démontrées. L'étude des renards, bien que limitée en raison de la rareté des restes, révèle l'existence d'une diversité relativement importante. Les variations de taille et de forme sont alors probablement plus liées à des variations géographiques et climatiques qu'à des contraintes anthropiques. Des différences dans la force de morsure au fildu temps sont suggérées pour les deux espèces, ce qui laisse supposer des changements dans la fonction du chien, et peut-être des adaptations fonctionnelles à un régime alimentaire de plus en plus influencé par les pratiques humaines.