Thèse en cours

Le marché locatif informel dans les quartiers non-réglementaires : vecteur des transformations urbaines et révélateur des inégalités socio-spatiales. Le cas de la banlieue sud de Beyrouth

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Auteur / Autrice : Rouba Kaedbey
Direction : Noria Semmoud
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Aménagement
Date : Inscription en doctorat le 03/11/2017
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : Sciences de l'Homme et de la Société

Résumé

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Le marché locatif informel dans les quartiers non-réglementaires de Beyrouth prend des proportions très importantes, notamment depuis l’arrivée massive des Syriens fuyant la guerre en Syrie depuis 2011. À travers une enquête qualitative, la thèse montre la façon dont le marché locatif informel contribue à des transformations socio-spatiales dans Ouzaï et Horch el-Qatil, deux quartiers non-réglementaires de la banlieue sud de Beyrouth. Cela se traduit par des formes diverses d’appropriation et de marquage de l’espace de la part de la population dont la plus visible est la densification du bâti. La location contribue par ailleurs à recomposer les rapports sociaux au sein du quartier et notamment entre les anciens propriétaires et nouveaux locataires. Il ressort également que la location est à l’origine d’un (re)façonnement des hiérarchies sociales qui se traduisent par des mobilités sociales ascendantes chez une partie des propriétaires-bailleurs d’origine sociale modeste, voire à leur accès au statut de notabilité locale. Cela peut être accompagné par une dégradation des conditions de vie, voire un déclassement social de la population locataire composée de migrants et de jeunes, fragiles, subissant généralement des rapports de domination de la part des bailleurs. Ces dynamiques redessinent les territoires en établissant des frontières sociales mais aussi spatiales entre différentes populations. À l’échelle de la ville, ils induisent des processus de marginalisation liés au renforcement des représentations négatives qui sont associées aux quartiers d’accueil des migrants. Sans cadre de régulation, les dynamiques générées par la location constituent un des vecteurs déterminants dans le creusement des inégalités socio-spatiales au sein des quartiers. Les inégalités ici sont étudiées par le prisme de l’habiter des migrants-locataires. Habiter les quartiers non-réglementaires de Beyrouth suppose un chemin semé d’embûches. Il s’agit de démontrer que malgré les dix ans d’exil des réfugiés syriens et plus pour les travailleurs étrangers, l’habiter, au sens de l’appropriation et de l’ancrage, reste une expérience inachevée, dans un tel milieu hostile. L’inaccessibilité à l’habiter de ces migrants s’avère être ainsi une des formes d’inégalité symbolique qui les affectent. L’analyse de l’ensemble de ces dynamiques (les transformations urbaines, les formes d’appropriation, les frontières sociales, l’habiter et les inégalités) me mène à questionner le devenir des quartiers non-réglementaires en prise avec un marché locatif informel attractif des migrants pauvres, devenu de fait un « parc de logements sociaux ». À l’heure où l’accès à la propriété, même informel, devient presque impossible et où aucune politique sociale de l’habitat n’est mise en oeuvre, qu’en est-il alors de la sécurité en matière de logement des locataires et de leurs conditions de vie ? Qu’en est-il aussi du devenir des ressources des quartiers non-réglementaires face aux écarts sociaux grandissants, face à la forte densification du bâti qui dégrade les conditions d’habitat, face à un niveau d’équipement et de services de plus en plus insuffisant et face à la montée de représentations désignant les migrants comme responsables de ces dynamiques ?