Thèse soutenue

Le locus de la mer chez les poètes augustéens : miroir et creuset des mutations poétiques, politiques et morales du début du Principat

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Auteur / Autrice : Oriane Demerliac
Direction : Bénédicte DelignonPascal Arnaud
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langues et littératures anciennes
Date : Soutenance le 04/12/2019
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, linguistique, arts (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : établissement opérateur d'inscription : École normale supérieure de Lyon (2010-...)
Jury : Président / Présidente : Christophe Cusset
Examinateurs / Examinatrices : Bénédicte Delignon, Pascal Arnaud, Christophe Cusset, Hélène Casanova-Robin, Juliette Dross, Damien P. Nelis
Rapporteurs / Rapporteuses : Hélène Casanova-Robin, Juliette Dross

Résumé

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Pour montrer la richesse des représentations poétiques de la mer, l’époque augustéenne constitue un moment clef. Avec la bataille d’Actium, la mer occupe une place nouvelle à Rome et devient un enjeu majeur, lieu de victoires et de pouvoir dans le discours d’Auguste et dans l’imaginaire romain, à un moment de refondation aussi bien politique que morale de la cité après les guerres civiles. C’est la manière dont cet objet s’est constitué en tant que catalyseur de toutes les grandes mutations de l’époque augustéenne qui retient notre attention. Nous étudions la mer comme locus, c’est-à-dire comme un objet poétique susceptible de refléter ou de modifier le lieu réel où l’activité humaine se déploie durant l’histoire grecque et romaine, mais aussi les représentations socioculturelles. Dans notre première partie, nous entreprenons une comparaison des rapports à la mer chez les Grecs et les Romains, dans leur histoire, leurs mentalités et leur littérature. Il apparaît que d’un point de vue axiologique, si la mer des poètes augustéens reçoit un traitement négatif en grande partie influencé par la poésie grecque, ce motif est enrichi d’un élément inédit : la condamnation de la navigation. Reliée aux guerres et à la luxuria, elle s’inspire chez les poètes augustéens d’une synthèse entre les influences de la philosophie grecque et de la morale traditionnelle : elle devient le lieu d’expression des passions humaines, depuis la cupidité jusqu’à la colère du Prince. Mais les poètes augustéens ont aussi été sensibles à l’héritage grec du motif épique de la mer : Virgile, dans l’Énéide, élabore à partir des modèles grecs un héroïsme nouveau, adapté à l’arrière-plan culturel romain, où prime la pietas, dans des errances où les épreuves maritimes sont systématiquement désamorcées. Ovide, dans ses Métamorphoses, relit Virgile pour déconstruire cette mer de la fabrique des héros et proposer une nouvelle représentation de la mer, miroir de la Pax Augusta. Pourtant, c’est l’élégie qui, en transférant toute ses ambiguïtés au locus marin, en fait le mieux le miroir troublant des changements politiques et des mutations morales que connaît Rome au début du Principat : la réélaboration élégiaque du motif épique de la mer est l’occasion du questionnement et de la réaffirmation des valeurs du mos maiorum, d’expérimentations génériques et surtout de la construction d’un nouvel héroïsme en mer, celui d’Auguste à Actium.