Thèse soutenue

Discours sur la diversité culturelle et l'unité nationale au Cameroun : l'Etat postcolonial face au clivage francophones/anglophones.

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Auteur / Autrice : Nicanor Tatchim
Direction : Claire Oger
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'Information et de la Communication
Date : Soutenance le 13/10/2020
Etablissement(s) : Paris Est
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale Cultures et Sociétés (Créteil ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'étude des discours, images, textes, écrits et communications (Créteil)
Jury : Président / Présidente : Marlène Coulomb-Gully
Examinateurs / Examinatrices : Claire Oger, Marlène Coulomb-Gully, Aude Seurrat, Marie-Émmanuelle Pommerolle, Julien Auboussier, Caroline Ollivier-Yaniv
Rapporteurs / Rapporteuses : Aude Seurrat

Résumé

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Depuis une soixantaine d’années, le discours politique au Cameroun est dominé par laquestion de la « diversité culturelle » et de l’ « unité nationale ». Celle-ci s’impose du fait del'hybridité de l'État liée à son processus historique de formation. Le contact colonial entre leCameroun et l'Occident, particulièrement la France et l'Angleterre, a participé à la formationd'un État hybride à la fois francophone et anglophone. Une configuration ayant donné lieud’abord au « problème anglophone », puis à sa mutation à partir de 2016 en guerresécessionniste anglophone avec à ce jour plusieurs milliers de morts et des centaines demilliers de déplacés internes et externes. A cette bipolarité géo-identitaire au niveau vertical,il faut ajouter au plan horizontal plus de 230 groupes ethnolinguistiques qui constituent devéritables pôles identitaires périphériques. C’est cette complexité, unique sur le continent, quipermet de comprendre le discours d’État sur la diversité culturelle et les enjeux que celle-cisoulève : l'unité et l’intégration nationales. Car dès l’aube de la période postcoloniale, l'État amis en œuvre un dispositif politico-juridique et communicationnel visant à neutraliser laconflictualité ethno-identitaire et à produire la fiction d’un consensus.A partir du croisement des approches de l’analyse du discours, de la sociologie dua thèse montre que le processus de formation de l’État au Cameroun est intimement lié au langage politique. L’histoire de l’État postcolonial est ici aussi une histoire des pratiques discursives et communicationnelles du politique. Le discours d’État en postcolonie (camerounaise) met en lumière un enchevêtrement-contournement de réalités et enjeux multiples : politique et social, identitaire et sécuritaire, culturel et linguistique, juridique et économique, historique et mémoriel, endogène et exogène. C’est un système discursif, surplombant et propagandiste, qui vise la neutralisation de la conflictualité ethno-identitaire et sociale, et la conservation du pouvoir. La communication, les productions discursives, et parfois aussi le silence-effacement, renvoient ici à la Raison d’État. L’État leur doit (entre autres) sa vie, ou plus exactement sa survie. Le discours et en particulier les mots d’ordre tels que « Réunification », « unité nationale », «intégration nationale», «diversité culturelle», «unité dans la diversité» structurentl’idéologie unitaire.Au-delà, la thèse met en évidence, en fonction de la conjoncture socio-historique, entre autres, l’émergence d’une formation discursive oppositionnelle et l’injonction à la diversité culturelle issue des institutions supra-étatiques, la construction d’un discours diversitaire, puis d’un discours et d’une mémoire nationale uni-diversitaires. Elle montre un État esthéticien qui développe une cosmétique mémorielle, discursive et communicationnelle visant la décolonisation de l’héritage national, le polissage du récit communautaire, pour l’ « unité (du Cameroun) dans la diversité ».