Thèse soutenue

Grigny la Grande Borne : des années 1970 aux attentats de janvier 2015. Enquêtes : de quoi "jeunes" est-il le nom ? : réflexion sur l'action éducative et sur le rapport de l'Etat à la jeunesse aujourd'hui, à partir d'une enquête sur les dispositifs d'Etat et d'une enquête "du point des gens".

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Amar Henni
Direction : Sylvain Lazarus
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anthropologie
Date : Soutenance le 09/02/2016
Etablissement(s) : Paris 8
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences sociales (Saint-Denis, Seine-Saint-Denis ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoire sur l'architecture, la ville, l'urbanisme et l'environnement
Jury : Président / Présidente : Alain Bertho
Examinateurs / Examinatrices : Sylvain Lazarus, Yves Cohen, Chantal Talland, Claire Nioche
Rapporteurs / Rapporteuses : Patrick Deshayes, Francine Saillant

Résumé

FR  |  
EN

Ce travail de thèse est une ponctuation majeure de mon itinéraire, à la fois personnel et professionnel. Outre la connaissance des auteurs et des problématiques contradictoires sur les banlieues et les jeunes, particulièrement en France, je vais y engager des pratiques d’enquêtes, singulièrement sur les formes de consciences et de pensée des gens, dont Sylvain Lazarus proposait la méthodologie et les attendus problématiques sous l’intitulé de l’anthropologie des singularités subjectives. Je n’ai cessé depuis de m’y confronter, à Grigny mais aussi à Dakar et au Brésil dans le cadre de l’Observatoire des Banlieues et de Périphéries avec lequel je travaille depuis sa création en 2008. La thèse rend compte de ces différentes enquêtes en particulier :- l’une auprès des jeunes- l’autre auprès des professionnels tant de l’éducation que du travail social avec les enfants et les jeunes. Le résultat de ces enquêtes, appuyés sur l’étude des textes officiels ont confirmé ce dont m’avait convaincu ma propre expérience : le rapport des institutions aux jeunes, disons de l’État aux jeunes s’est qualitativement transformé dans le milieu des années 1990 : la défiance s’est substituée à la confiance, l’éducatif a été abandonné, lui a été substitué le sécuritaire.Ce travail de thèse analyse séquence par séquence cette transformation, en prenant appui aussi sur l’histoire interne de la Grande Borne et de ses drames, en particuliers les morts violentes des jeunes.Dans la partie introductive de la thèse est examinée la pertinence de la catégorie de jeunes. Aux propositions sur la catégorie de jeunes Olivier Galland, Alain Girard, Evelyne Sullerot et Dominique Pasquier, répond l’assertion sans appel de Pierre Bourdieu : « jeunes, cela n’existe pas »Puis est analysé comment dans la littérature académique et aussi dans les discours officiels, le mot ghetto, accolé à banlieues, va être un vecteur majeur d’appui de l’approche sécuritaire. Dans la partie 1 de la thèse sont analysés d’une part les auteurs qui théorisent la qualification de ghetto Dubet, Lapeyronnie, et Bronner mais également les arguments de ceux qui s’y opposent, Wacquant, Lazarus, Mucchieli, Ben-Messous. La partie 2 de la thèse confronte et met en perspective les politiques actuelles à l’endroit des jeunes avec ce qu’il en était dans les années 1974, et ce grâce aux remarquables enquêtes menées à Grigny auprès des enfants et leurs familles, auprès des assistantes sociales, des animateurs et des enseignants, par l’équipe de chercheurs du CNRS dirigée par Marie Josée Chombart de Lauwe. Sont également étudiés les arguments de l’architecte de la Grande Borne, Emile Aillaud, qui justifie en 1970 l’absence d’équipements de jeux pour les enfants à la Grande Borne, par l’apologie de l’enfant solitaire qui ainsi affronte l’ennui.Marie Josée Chambart de Lauwe décrira quelques années plus tard les conséquences désastreuses du choix d’Emile Alliaud dans son livre L’enfant en jeu. Elle affirme sa fidélité à l’esprit de l’ordonnance de 1945 qui stipule que, à l’endroit des enfants doit primer, dans le système judiciaire et pénal, l’enjeu éducatif sur la sanction. Cette référence au CNR traverse toute la thèse, la question étant de sauvegarder à tout prix l’importance majeur de l’éducatif dans les politiques publiques à l’endroit des jeunes, et ce dans une conjoncture ou, au nom du sécuritaire, beaucoup demandent que soient abandonnés les principes de l’ordonnance de 1945.La troisième partie de la thèse est consacré aux résultats des enquêtes auprès des habitants, précisément l’existence d’une pensée « du point des gens ». Celle-ci est complètement disjointe, séparée de la pensée dite du point de l’État et des institutions. Cette disjonction porte non seulement sur les mots, les lexiques, ils sont totalement différents mais également sur les intellectualités respectives