Thèse soutenue

Génétique de l’adaptation et de la spéciation : théorie et analyse de données de séquençage haut-débit dans le complexe d’espèces Mytilus edulis

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Auteur / Autrice : Christelle Fraïsse
Direction : Nicolas Bierne
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ecologie, évolution, ressources génétiques, paléontologie
Date : Soutenance le 16/12/2014
Etablissement(s) : Montpellier 2
Ecole(s) doctorale(s) : Systèmes Intégrés en Biologie, Agronomie, Géosciences, Hydrosciences, Environnement (Montpellier ; École Doctorale ; 2009-2015)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des sciences de l'évolution (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Patrice David
Examinateurs / Examinatrices : Nicolas Bierne, Patrice David, Stuart J. E. Baird, Oscar E. Gaggiotti, John W. Welch, Marianne Elias
Rapporteurs / Rapporteuses : Stuart J. E. Baird, Oscar E. Gaggiotti

Résumé

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Les génomes sont affectés par des régimes de sélection conflictuels. Ceci est particulièrement bien illustré par le concept de barrière semi-perméable au flux génique, issu de la littérature des zones hybrides. Certains gènes contribuent à empêcher le mélange entre lignées génétiques différenciées, soit parce qu'ils participent à l'adaptation aux conditions environnementales locales, soit parce qu'ils sont incompatibles avec les gènes d'autres lignées. D'autres parties du génome sont soit neutres, soit soumises à une sélection qui tend à homogénéiser les différentes lignées entre elles. Dans la première partie de cette thèse, des modèles d'évolution de l'isolement reproductif sont présentés pour expliquer les patrons d'isolements observés dans les expériences d'hybridation au laboratoire. Par modélisation classique d'incompatibilités génétiques de type Dobzhansky-Muller, il est montré que l'asymétrie et la complexité des incompatibilités sont imparfaitement expliquées par un filtre évolutif, c.a.d. une vitesse d'accumulation différente entre types d'incompatibilité. Une approche complémentaire de modélisation quantitative à l'aide d'une extension du modèle géométrique de Fisher a permis de préciser quelles conditions de divergence entre lignées isolées conduisaient à un effet fortement délétère des mutations dans les génotypes hybrides. L'importance relative du niveau d'épistasie moyen, de la distribution des effets des mutations et des modalités de l'adaptation de chaque lignée est discutée. La seconde partie de cette thèse profite des avancées techniques de la génomique pour étudier l'histoire de la spéciation et de l'adaptation dans un complexe d'espèces non-modèles, les moules du genre Mytilus. Une méthode statistique d'inférence de scénarios de spéciation est présentée. Les résultats montrent que les moules Européennes ont connu une histoire complexe de divergence stricte suivie d'une période de connectivité périodique. En accord avec le concept de barrière semi-perméable au flux génique, il est montré que les taux d'introgression sont hétérogènes le long du génome. Ensuite, des scans génomiques de la différenciation ont été menés entre paires de populations du complexe d'espèces. L'analyse de la variation génétique et des généalogies d'allèles sur une échelle chromosomique localisée a permis de reconstituer l'histoire évolutive de plus de 1000 régions du génome des moules. Cette analyse a révélé qu'une cause majeure, mais insoupçonnée, de la différenciation génétique intraspécifique est l'introgression différentielle d'allèles étrangers. Globalement, cette thèse montre non seulement le rôle majeur de la biogéographie de la spéciation, c.a.d. des patrons temporels et spatiaux du flux de gènes, dans notre compréhension de la biodiversité actuelle, mais aussi sa surprenante complexité et l'étendue de ses conséquences sur l'évolution des génomes.