Thèse soutenue

La fin d'une illusion : quand la politique de l'autruche dysfonctionne et que le clivé fait retour : analyse à partir d'une clinique libanaise 2000-2006

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Auteur / Autrice : Dany Dahdouh-Khouri
Direction : René Roussillon
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance le 17/09/2014
Etablissement(s) : Lyon 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de l'éducation, psychologie, information et communication (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherches en psychopathologie et psychologie clinique (Bron, Rhône ; 1993-...)
Jury : Président / Présidente : Anne Brun
Rapporteurs / Rapporteuses : Mohammed Ham, Vincent Estellon

Résumé

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Ce travail de recherche prend sa source dans mes diverses expériences professionnelles, sur plus de dix ans, en tant que psychologue clinicienne et psychanalyste en formation, exerçant avec des enfants, des adolescents, leurs familles ainsi qu’avec des adultes. Il s’agit d’une clinique particulière puisqu’elle a été recueillie au Liban, un pays qui a une histoire difficile à cerner, ponctuée de guerres et parsemée de violences. Un pays qui est marqué par un système de résonance et d’écho entre les traumas individuels et les rapports aux traumas collectifs. Cette recherche porte plus précisément sur une population bien définie puisqu’elle est exclusivement constituée d’ex-enfants, puis ex-adolescents de la guerre de 1975 à 1991 ayant vécu dans l’ex-Beyrouth-Est, puis devenus désormais adultes. Elle est aussi caractérisée par le fait qu’une fois le travail de la cure est bien avancé, j’ai pu comprendre que j’avais durant mon enfance puis mon adolescence, partagé, des tranches de vie avec mes patients. Ces moments étaient des vécus de guerre traumatiques. En effet, mes patients adultes, les parents des petits en cure et moi-même, nous-nous sommes trouvés aux mêmes endroits, et nous avons vécu aux mêmes moments, seuls, loin des adultes, les mêmes événements de guerre. Il s’agit d’une réflexion qui englobe au final, quatre générations. Je m’interroge sur la qualité du lien qui existerait entre la question des particularités du travail d’élaboration de situations de traumatismes personnels et de traumatismes familiaux au sein de thérapies d’enfants. Mon interrogation porte également sur le type d’intéraction qu’il y aurait entre le trauma spécifique du parent ex-enfant de la guerre et celui du trauma collectif propre à un pays en guerre. Comment ceci se joue-t-il dans la cure et avec le thérapeute de l’enfant (génération 1) né après la guerre ? Je m’interroge, d’une part, sur les modalités défensives des parents (génération 2) et les particularités des traumatismes personnels internes qui survenaient en écho avec des traumatismes familiaux entremêlés et emboîtés aux traumatismes cumulatifs collectifs/sociaux. D’autre part, je me questionne à propos de la psyché parentale qui me semblait figée, envahie, prisonnière d’un « entre-deux intérieur/extérieur-non-humain, fantasme/réalité », aux liens forts et inapparents qui semblaient inexistants mais desquels ils ne pouvaient pas se libérer à l’âge adulte. Je me demande si les enfants (génération 1) nés après la guerre, ne seraient pas pour leurs parents (génération 2), réduits à un symptôme ; symptôme que ces derniers n’auraient pas eu la possibilité de porter durant leur vécu infantile. L’enfant (génération 1) ne serait-il pas le porteur du « clivé parental » ? Je me demande finalement si les parents (génération 2) pourraient avoir accrédité, lors de l’entretien qui fixe le cadre, le contrat muet ou pacte suivant : « nous savons/vous savez ce que nous avons/vous avez vécu dans notre/votre enfance : on le pose là et on n’en parle pas ». Même si ce pacte n’a pas été explicité verbalement, la transmission s’établissait d’une autre manière : au-delà du langage. C’est pour cette raison qu’en confiant leur enfant, ces parents (génération 2) parvenaient enfin et pour la première fois, à confier l’enfant en eux à une personne qui « saurait », qui « serait passée par là » et qui a « les mots pour l’exprimer ». Pour essayer de répondre à mes interrogations, je tente d’introduire et d’expliquer une modalité particulière de vivre le cadre analytique : il s’agirait d’une co-construction, avec le patient d’un cadre. Ce cadre serait comme une piste de danse propice à la mise en place d’une « chorégraphie de la cure » qui permettrait à l’analyste et son patient de « danser avec la cure ». Ceci sous-entend un mouvement de rythmicité, un rapproché, un va et viens nécessaire à l’évolution....