Thèse soutenue

Économie et comportements sociaux et politiques : la région de Saint-Étienne : de la Grande dépression à la seconde Guerre mondiale

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Auteur / Autrice : Jean Lorcin
Direction : Antoine Prost
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance en 1987
Etablissement(s) : Paris 1

Résumé

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Dans une région née de l'industrialisation, une étroite interdépendance unit économie, société, politique et culture. Le retard pris sur ses concurrents par le bassin industriel stéphanois depuis la grande dépression explique le conservatisme d'une population en majorité ouvrière. En effet, le bassin stéphanois, endormi par les rentes de situation créées par son isolement, a mal résisté à la concurrence des autres régions industrielles après son désenclavement par le chemin de fer, malgré une reconversion réelle, mais inachevée. Le poids des structures héritées de la première révolution industrielle, voire de la proto-industrialisation, l'explique. Le dualisme économique a un prolongement social. Le petit patronat restait influent et l'artisanat résistait à la prolétarisation, ce qui a contribué à freiner la modernisation du mouvement ouvrier jusqu'au début du vingtième siècle. La vie politique se ressentait de cet archaïsme et l'incapacité de la gauche à épouser son siècle explique la revanche électorale d'une droite rénovée et modernisatrice après 1900. Même le projet de décentralisation dramatique de la municipalité socialiste réformiste issue à Saint-Etienne des élections de 1900 à achoppé sur cet obstacle. Loin de jouer le rôle d'accélérateur, la guerre a freiné à son tour la reconversion de l'économie stéphanoise en donnant aux producteurs des habitudes de facilité, le climat de pénurie aidant, au même titre que la croissance des années 20. La crise de 1929 elle-même n'a pas achevé l'artisanat. Le mouvement ouvrier, après les espoirs suscités par la vague révolutionnaire de 1917, a subi le contrecoup de cette stagnation qui a favorisé, en fait, la montée des extrémismes. Le parti socialiste S. F. I. O. N'a pu réellement s'implanter dans une région où il est resté laminé entre une droite renforcée par les transfuges du radicalisme et une extrême gauche dominée par le parti communiste, le front populaire aidant. Bien plus, certaines positions, dans les rangs de la droite comme des survivants du syndicalisme révolutionnaire, annonçaient Vichy. Dans ce contexte, les tentatives de décentralisation culturelle des années 20 ont tourné court, le conformisme finissant par l'emporter dans les années 30.