Thèse soutenue

Une recherche de la pure écriture : du paradoxe à la répétition : analyse stylistique des oeuvres dévotes de Fénelon

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Auteur / Autrice : Agathe Mezzadri
Direction : Violaine Géraud
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littératures française et francophone
Date : Soutenance le 31/03/2016
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, linguistique, arts (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : établissement opérateur de soutenance : Université Jean Moulin (Lyon ; 1973-....)
Jury : Président / Présidente : François-Xavier Cuche
Examinateurs / Examinatrices : François-Xavier Cuche, Gilles Siouffi, Olivier Leplâtre, Alain Rabatel
Rapporteurs / Rapporteuses : François-Xavier Cuche, Gilles Siouffi

Résumé

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Parallèlement au pur amour pour Dieu, c’est le rêve d’une pure écriture que Fénelon semble poursuivre lorsqu’il rédige ses œuvres dévotes. Pour le mystique, parvenir à l’amour pur suppose d’anéantir totalement sa volonté pour ne laisser place, en soi, qu’à la volonté de Dieu. De même, pour l’écrivain, la pure expression est celle qui fait parler le « Verbe », tout en faisant taire « le bruit des créatures » (Lettre à la sœur Charlotte de Saint-Cyprien, 10 mars 1696). Nous avons donc mis au jour une analogie entre la recherche d’une écriture idéalement transparente au Verbe et la doctrine du pur amour pour Dieu, par le même effacement du moi. L’enjeu de ce travail de thèse a été d’analyser les phénomènes linguistiques ressortissant à cette analogie, ainsi que leurs présupposés théologiques, philosophiques, et même parfois psychanalytiques. Pour ce faire, notre travail suit la trajectoire stylistique singulière de Fénelon dans ses œuvres dévotes : du paradoxe à la répétition. L’association des deux figures, qui ne va pas de soi à première vue, informe, en effet, une réflexion en acte sur la pure écriture. Si le paradoxe est le moyen d’expression le plus pur pour les poètes baroques et mystiques dont Fénelon a été vu comme un continuateur, il est un procédé ignoré ou condamné par les logiques, rhétoriques et grammaires classiques. En outre, lorsqu’il est brillant et incisif - ce que nous nommons paradoxe rhétorique - le procédé ne satisfait pas le nécessaire effacement du moi requis par le pur amour. C’est pourquoi, la quête de la pure écriture passe de la difficile reprise du paradoxe baroque par le mystique du Grand Siècle à son échappatoire dans la répétition.Dans une première partie, après avoir étudié les différentes définitions du paradoxe selon les temps, les types de paradoxe, les disciplines de référence et selon les théoriciens, nous situons la position de Fénelon en le replaçant dans son contexte historique. Puis nous mettons au jour, dans une seconde partie, l’effort de Fénelon pour parvenir à une pure écriture, effort qui est pris dans une ambiguïté entre condamnation du paradoxe rhétorique comme instrument mondain de langage et expression du paradoxe mystique. Fénelon tente d’atténuer le paradoxe, soit qu’il essaie, en le transformant en pseudo-paradoxe, d’éliminer l’effet de violente surprise qu’il comporte, soit même qu’il cherche à prendre une distance avec le paradoxe mystique en le réduisant par l’abondance des explications, tout en cultivant l’effacement énonciatif. La dernière partie démontre comment cette abondance s’exprime à travers l’usage infiniment développé de la répétition, au sein duquel nous distinguons ce qui vient d’une pulsion de mort et ce qui s’origine dans une pulsion de vie, dans le pur amour d’un Dieu infini, foncièrement équivoque.