Thèse soutenue

Prolégomènes à une herméneutique existentielle des antéformes architecturales

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Auteur / Autrice : Thomas Richard
Direction : Jean-Jacques Wunenburger
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie
Date : Soutenance le 28/01/2020
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de philosophie (Lyon ; Grenoble ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : établissement opérateur de soutenance : Université Jean Moulin (Lyon ; 1973-....)
Jury : Président / Présidente : Jean-Philippe Pierron
Examinateurs / Examinatrices : Chris Younès, Julie Cattant
Rapporteurs / Rapporteuses : Artur Rozestraten, Chris Younès

Résumé

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Dans l’historiographie contemporaine, le déconstructivisme constitue un moment significatif d’une expression négative de la forme. En effet, la morphologie architecturale met en vue une recomposition à partir d’une décomposition : elle affirme et présente un processus de négation. Comment comprendre ces formes architecturales paradoxales qui expriment leur propre abolition et quelles sont les différentes manifestations de cette négativité morphologique dans l’architecture contemporaine ? En effet, bien que se défendant de toute attention à la forme, les architectures qualifiées de non-rhétoriques par l’historien J. Lucan (A. Lacaton & J.-P. Vassal, OFFICE Kersten Geers David Van Severen etc.), en cherchant précisément à faire disparaître toute expressivité morphologique, ne participent-elles pas d’une même visée que le déconstructivisme, lequel opère ce retrait de la forme de manière explicite ?Une première partie de cette recherche se propose d’explorer différentes approches d’architectes et de philosophes qui ont consacré une partie ou l’ensemble de leurs travaux à l’imagination et à la poïétique des formes : J. Lucan, D. Guibert, D. Raynaud, E. Cassirer, G. Bachelard, G. Durand. Dans une deuxième partie, dans le sillage de l’œuvre d’H. Maldiney qui établit un parallèle entre Art et existence, j’inscris ma recherche dans une herméneutique existentielle de ces formes négatives que j’ai nommées : antéformes. Mon hypothèse s’attache à proposer qu’au fondement négatif de notre rapport au monde répond une mise en forme négative des morphologies architecturales. En attaquant leur propre forme, c’est-à-dire le sens de la mise en forme proprement dite, les antéformes posent la question de ce qui fonde leur existence et y répondent en projetant dans l’objet une manière de se rapporter au monde. Certains concepteurs contemporains donnent à voir en partie et projettent à leur insu leur propre expérience vécue et désirante de la quête cherchante de forme qui les habite lors de la conception. Dans cette recherche, je suggère ainsi d’établir une analogie entre l’état poïétique et l’expression d’une forme négativée de l’œuvre. En outre, je m’emploie à repérer, proposer et articuler dans une architectonique des antéformes, différentes modalités de néantisation de la forme architecturale pouvant correspondre à des styles ou orientations de la présence proposés par le philosophe. Je développe ainsi des schèmes stylistiques fondés sur des tendances pulsionnelles ou qualités énergétiques tensives. Enfin, je propose que les antéformes expriment un ça-voir poïétique de la crise qui les fondent, les émotivent, et témoignent de cette épreuve surmontée. Il s’agit ici de réactiver la double implication originaire du verbe poïen : à la fois accomplissement et novation. Tout travail poïétique, en tant qu’il demeure porté par une exigence de singularité, implique l’imprévisibilité de l’objet qui émergera de son processus de conception. Les antéformes sont un appel à concevoir au sens plein du terme tout autant qu’un appel à un rapport propre (authentique) à l’existence ; lequel s’envisage, non comme un Moi ou un cogito qui se pose, mais comme le processus d’individuation d’un Soi. Celui-ci ne peut exister sans un travail incessant de désindividuation préalable dont les antéformes sont le témoignage. L’acte poïétique invite, non à choisir parmi des possibles préalables, mais précisément à engendrer sa propre forme d’être au monde.